Ce samedi matin, un fidèle client et ami m'a interpellé. Sa question était simple. Ma réponse ne l'a pas été, car j'étais gêné.
"Alain, pourquoi ne proposes-tu plus ta tarte au formage spéciale, celle plus épaisse, aux amandes?"
J'ai marmonné une réponse, sans oser dire la vérité. Depuis cet instant, cela me ronge et je vous doit la vérité. Cela fait trop longtemps que je le gardais pour moi, pour rester fidèle à mon image de boulanger toujours positif. Alors voilà...
Je ne fabrique plus de tartes aux amandes car les amandes sont devenues... impayables. Voilà pourquoi! C'est simple et tragique car cela ne s'arrête pas là. Je paye aujourd'hui 11.000 euros chaque mois pour l'électricité (soit fois 3 en quelques mois). Heureusement, mes fours sont alimentés aux mazout (seulement fois 2). La farine, le beurre et les oeufs ont également doublé dans la même période.
J'ai une chance, c'est d'avoir senti le vent tourner et d'avoir stocké un maximum de denrées. Mais à ce rythme, dans un an, je devrai à mon tour fermer la boutique ou plutôt les boutiques puisque avec "Comme Avant" de mon fils Diego et bientôt "L'Héritage" de ma fille Jade, nous alimentons 5 boulangeries (Incourt, Chaumont-Gistoux, Lasne, Grez-Doiceau et Wavre) et payons les salaires de 17 équivalents temps plein.
J'ai été obligé d'augmenter mes prix de 20 % il y a deux mois et dans une semaine, je vais ajouter 15% de hausse, c'est le minimum pour garder l'activité viable. Mais je ne toucherai pas au prix du pain carré blanc de 800 grammes, devenu notre meilleure vente avec la crise. C'est 2,9 euros et je n'y toucherai pas! Plutôt fermer boutique. Les gens sont tous impactés par cette crise et moi je crois dans le rôle de lien social de notre boulangerie de village.
Voilà, j'ai vidé mon sac. Vous savez tout! On va se serrer les coudes et rester ouvert jusqu'à ce qu'on ne puisse vraiment plus. Merci à toutes et tous pour votre fidélité
Et, de tout coeur, désolé pour ces augmentations.
Votre boulanger. Alain.
Via la page de La Magie du Pain