kamomille
VIB
| 10.04.10 | 14h12 Mis à jour le 10.04.10 | 14h52
La douleur de la banlieue ne peut être discrète. Elle déborde, éclabousse et perturbe. La douleur, c'est l'ennui qui creuse le sillon du malheur dans des corps désoeuvrés ne sachant que faire de leur jeunesse, de leurs ambitions, de leurs rêves. La promiscuité, l'échec scolaire, le chômage sécrètent cet ennui qui égare et expulse ceux qui en souffrent vers la marge, un territoire occupé par les professionnels de l'illégalité. Trafics et brutalité.
De la plus haute des solitudes (les années 1960) on est passé à une forme de détresse où le corps n'est plus mutilé mais exposé à la violence. Les uns étaient des travailleurs immigrés arrivés en France sans leur femme, les autres sont des Français que ces mêmes immigrés ont faits grâce au regroupement familial (1974).
Les immigrés ne s'ennuient pas. Ils vivent ou survivent en assistant au naufrage de leur destin. Ils ont fait des enfants pour être moins seuls, pour être comme les autres et puis ils se sont rendu compte que tout leur échappe. Ils ne maîtrisent rien, ni le temps qui passe ni le mode de vie de leur progéniture. Ils se sentent largués, oubliés sur le bord de la route. Certains s'en accommodent et sont même heureux. D'autres regardent la vie se dérouler avec l'espoir qu'elle soit clémente avec eux.
Quand on leur apprend que leur fils est mort suite à une bagarre ou après un acte de délinquance, ils restent abasourdis, le ciel leur tombe sur la tête et ils ne comprennent pas pourquoi ils ont été choisis par le malheur. Quand leur cité devient le théâtre de règlements de comptes entre bandes rivales ou entre ces bandes et la police, quand des bus sont incendiés et que la police démantèle un réseau de trafiquants de drogue, les parents, ceux qui regardent par la fenêtre, sont impuissants, sans voix, sans recours. Peut-être qu'il leur arrive de se poser cette question : "Est-ce que le voyage en valait la peine ?" Tout compte fait, et sans avoir la naïveté de refaire l'histoire, la question est cruelle mais légitime. Tout ça pour ça ! Et surtout ne plus continuer à confondre les immigrés, ceux qui ont fait le voyage, avec leurs enfants, nés sur le sol français et qui sont de nationalité française. Ce sont ceux-là qui s'ennuient et ne savent que faire du temps qui les encombre. Evidemment il y en a qui s'en sortent et réussissent malgré tous les obstacles. Ceux-là s'éloignent de la banlieue. On parle à leur propos d'intégration. C'est une erreur. On intègre l'étranger, pas l'indigène, l'autochtone. Il faudrait parler de "promotion", de "reconnaissance".
L'automne chaud de 2005 a été une alerte. Des milliers de véhicules (dont beaucoup appartenant à des immigrés) ont été incendiés. C'était l'époque du "Krcher" et des promesses de nettoyage à sec. C'était un appel au secours d'une génération de Français que la France traitait comme des bâtards, des enfants nés hors mariage. Aujourd'hui, ils sont devenus, d'après les termes du ministre de l'intérieur, "des crapules". Bien, c'est entendu, des trafiquants de drogue ne sont pas de braves gens, certains ont même rejoint le crime organisé. Mais pourquoi ne pas se poser la question de savoir pourquoi Tremblay par exemple est devenue le repère des trafiquants et des bandits ? Comment devient-on délinquant puisque, jusqu'à présent, personne ne naît avec des gènes de délinquant ? La répression assouvit un désir de riposte mais ne règle pas le fond du problème. On peut "intensifier des opérations coups de poing" comme le suggère le président de la République. Cela ne résoudra pas le problème de fond. Or, la banlieue, telle qu'elle a été conçue puis négligée pour ne pas dire oubliée, est devenue un lieu pathogène.
La douleur de la banlieue ne peut être discrète. Elle déborde, éclabousse et perturbe. La douleur, c'est l'ennui qui creuse le sillon du malheur dans des corps désoeuvrés ne sachant que faire de leur jeunesse, de leurs ambitions, de leurs rêves. La promiscuité, l'échec scolaire, le chômage sécrètent cet ennui qui égare et expulse ceux qui en souffrent vers la marge, un territoire occupé par les professionnels de l'illégalité. Trafics et brutalité.
De la plus haute des solitudes (les années 1960) on est passé à une forme de détresse où le corps n'est plus mutilé mais exposé à la violence. Les uns étaient des travailleurs immigrés arrivés en France sans leur femme, les autres sont des Français que ces mêmes immigrés ont faits grâce au regroupement familial (1974).
Les immigrés ne s'ennuient pas. Ils vivent ou survivent en assistant au naufrage de leur destin. Ils ont fait des enfants pour être moins seuls, pour être comme les autres et puis ils se sont rendu compte que tout leur échappe. Ils ne maîtrisent rien, ni le temps qui passe ni le mode de vie de leur progéniture. Ils se sentent largués, oubliés sur le bord de la route. Certains s'en accommodent et sont même heureux. D'autres regardent la vie se dérouler avec l'espoir qu'elle soit clémente avec eux.
Quand on leur apprend que leur fils est mort suite à une bagarre ou après un acte de délinquance, ils restent abasourdis, le ciel leur tombe sur la tête et ils ne comprennent pas pourquoi ils ont été choisis par le malheur. Quand leur cité devient le théâtre de règlements de comptes entre bandes rivales ou entre ces bandes et la police, quand des bus sont incendiés et que la police démantèle un réseau de trafiquants de drogue, les parents, ceux qui regardent par la fenêtre, sont impuissants, sans voix, sans recours. Peut-être qu'il leur arrive de se poser cette question : "Est-ce que le voyage en valait la peine ?" Tout compte fait, et sans avoir la naïveté de refaire l'histoire, la question est cruelle mais légitime. Tout ça pour ça ! Et surtout ne plus continuer à confondre les immigrés, ceux qui ont fait le voyage, avec leurs enfants, nés sur le sol français et qui sont de nationalité française. Ce sont ceux-là qui s'ennuient et ne savent que faire du temps qui les encombre. Evidemment il y en a qui s'en sortent et réussissent malgré tous les obstacles. Ceux-là s'éloignent de la banlieue. On parle à leur propos d'intégration. C'est une erreur. On intègre l'étranger, pas l'indigène, l'autochtone. Il faudrait parler de "promotion", de "reconnaissance".
L'automne chaud de 2005 a été une alerte. Des milliers de véhicules (dont beaucoup appartenant à des immigrés) ont été incendiés. C'était l'époque du "Krcher" et des promesses de nettoyage à sec. C'était un appel au secours d'une génération de Français que la France traitait comme des bâtards, des enfants nés hors mariage. Aujourd'hui, ils sont devenus, d'après les termes du ministre de l'intérieur, "des crapules". Bien, c'est entendu, des trafiquants de drogue ne sont pas de braves gens, certains ont même rejoint le crime organisé. Mais pourquoi ne pas se poser la question de savoir pourquoi Tremblay par exemple est devenue le repère des trafiquants et des bandits ? Comment devient-on délinquant puisque, jusqu'à présent, personne ne naît avec des gènes de délinquant ? La répression assouvit un désir de riposte mais ne règle pas le fond du problème. On peut "intensifier des opérations coups de poing" comme le suggère le président de la République. Cela ne résoudra pas le problème de fond. Or, la banlieue, telle qu'elle a été conçue puis négligée pour ne pas dire oubliée, est devenue un lieu pathogène.