Au milieu du 13ème siècle, et après avoir ravagé lIrak et la Syrie, la redoutable armée mongole était aux portes de lEgypte. Sayf-eddine Qutuz, sultan dEgypte, a réuni alors ses ministres et ses officiers pour préparer une guerre difficile et périlleuse. Mais les coffres de lEtat étaient vides et largent disponible était insuffisant pour équiper une armée capable de faire pièce au puissant ennemi. Pour renflouer les caisses, il fallait donc augmenter les impôts et créer des taxes supplémentaires, chose impossible sans une fatwa, un avis des oulémas qui lautorise. Le prince sadressa alors à la plus grande autorité religieuse de son temps, le Cheikh Ibn Abdessalam, pour lui fournir la permission dimposer de nouvelles taxes et lever les fonds nécessaires au Jihad. Le cheikh Ibn Abdessalam, surnommé « le sultan des oulémas », émettra alors une fatwa célèbre, dun courage inédit. Selon cette fatwa, en cas de nécessité ou de guerre, le prince peut augmenter les impôts et demander une contribution au peuple, mais à condition que le prince lui-même, ses ministres, ses officiers et les riches du pays rendent tous leurs biens à lEtat et se mettent au même niveau deffort et de sacrifice demandé aux gens. Les livres dHistoire racontent que le sultan Qutuz a accepté lavis du Cheikh Ibn Abdessalam, en ne gardant que son cheval et son épée pour mener une guerre victorieuse contre lennemi mongole, définitivement battu lors de la bataille dAin Jalout en 1260.
Cette histoire pourrait bien être utile à Abdelillah Benkirane, au moment où son gouvernement et lui ne cessent de parler de crise, deffort et de sacrifice. Dautant plus que Benkirane connait bien le Cheikh Ibn Abdessalam pour lavoir fréquemment cité dans ses écrits et discours pendant les années 80, du temps où le PJD nétait quune petite association contestataire.
Quand le Chef du gouvernement dresse un constat pessimiste, mais réaliste, de létat des finances publiques et notamment de la caisse de compensation, il a bien raison de le faire et il faut le saluer pour cela. Benkirane agit alors en homme dEtat responsable et honnête, qui ne flatte pas ses électeurs et ne les berne pas avec un discours et des mesures populistes qui éclateront comme une baudruche le jour où le Maroc sera réellement en état de faillite. Sur cela, rendons au Chef du gouvernement ce que lui est dû.