que dit le coran
– Tout d’abord, cf. note 1 & 2, rappelons qu’aucun verset n’énonce la croyance à al–qaḍâ’/prédestination wa al–qadar/Décret. De plus, le terme-concept al–qaḍâ’ n’est pas employé par le Coran, il s’agit là d’un concept théologique forgé à partir de l’emploi du verbe coranique qaḍâ indiquant soit la prédétermination de toute éternité soit l’accomplissement en notre réalité d’un arrêt divin. De même, la forme déterminée al–qadar, qui ne doit pas être confondue avec al–qadr,[9] est elle aussi absente du Coran. Ceci étant précisé, de nombreux versets ont été mis en jeu au service de l’institution sunnite de ce sixième point de dogme surajouté. Nous envisagerons donc les principaux en suivant la présentation des trois concepts en cause quant à notre problématique : al–qaḍâ’ ; al–qadar ; al ikhtiyâr.a– Al–qaḍâ’. Compris comme indiquant la prédétermination–prédestination absolue de tout acte humain, citons le verset suivant selon le sens courant : « c’est Dieu qui vous a créés, vous et ce que vous faites/ta‘malûna ».[10] Argument maximaliste : Dieu serait donc le seul Agent en Sa création et l’Homme un simple exécutant. Cependant, ce verset n’est pas une sentence isolée et son contexte d’insertion ne relève en rien d’une théorisation sur le Destin. En effet, en ce passage ce n’est point Dieu qui parle, mais Abraham dont il est rapporté une polémique entre lui et les polythéistes de son peuple, vs83-99. Abraham leur reproche d’adorer des divinités dénuées de réalité et de tout pouvoir et leur fait observer la stupidité de leurs croyances : « Adorez-vous ce que vous sculptez vous-mêmes dans la pierre ! », v95, c’est-à-dire au lieu d’adorer Dieu votre créateur. Notre v96 se comprendrait donc comme suit : « alors que Dieu vous a créés ainsi que ce que vous avez fabriqué/ta‘malûna [c.-à-d. vos idoles de pierre] ».[11] Ce propos est d’évidence sans rapport avec la question théologique de la prédestination et donc aussi avec celle du libre arbitre qui serait ici prétendument rejeté. Malgré tout, si telle était la signification voulue, cela supposerait que Dieu s’attribue la fabrication de statues que par ailleurs Il rejette par la narration même de ce récit. Aussi, est-il plus cohérent de comprendre le segment wa mâ ta‘malûna ordinairement traduit avec la particule « mâ » prise comme pronom relatif : « et ce que vous fabriquez », en considérant que cette même particule « mâ » est ici interrogative ou exclamative, donc : « que faites-vous donc ? » ou « que faites-vous donc ! », d’où : « Adorez-vous ce que vous sculptez vous-mêmes dans la pierre alors que Dieu vous a créés ! Que faites-vous donc ! », vs95-96.