Pour le Hezbollah, c’est une déclaration de guerre. Dès lors, tout s’accélère. Au cours de la deuxième quinzaine de mai, une mission du Polisario est repérée dans le bastion chiite de Beyrouth-Ouest. Les noms de ceux qui la conduisent sont soigneusement notés – en particulier ceux de Mustapha Mohamed El Amine, représentant du Front pour le Moyen-Orient, et du conseiller en communication Lahritani Ould Lahcen – ainsi que ceux de leurs hôtes : des responsables du Hezbollah chargés des opérations extérieures. Si l’on en croit les documents consultés par JA, deux délégations de la branche armée du « parti de Dieu » se seraient rendues en juillet et en août 2017 dans les camps du Polisario de la région de Tindouf pour y sélectionner des stagiaires susceptibles de participer à des entraînements de guérilla urbaine.L’IRRUPTION D’UN NOUVEL ACTEUR MILITAIRE DANS UNE CRISE AUSSI VOLATILE QUE CELLE DU SAHARA EST POTENTIELLEMENT EXPLOSIVE
Plus grave, début avril 2018, en marge d’une réunion tenue entre des cadres de la commission militaire du Hezbollah et les responsables des sept régions des camps de Tindouf, une livraison de missiles Sam 7, 9 et 11 ainsi que de lance-roquettes aurait été effectuée dans un centre d’instruction secret « quelque part à l’est » de cette localité algérienne. À la manœuvre : le numéro deux de l’ambassade d’Iran à Alger, Amir Moussaoui, officiellement conseiller culturel, en réalité cadre important du corps des Pasdaran – c’est tout au moins ce dont sont persuadés les services marocains.
Pyromanie
Certes, d’Alger à Téhéran en passant par Beyrouth, tout le monde nie : c’est la règle du jeu. Et nul n’a oublié que, de 2009 à 2014, les relations diplomatiques entre le Maroc et l’Iran avaient déjà été rompues, Rabat reprochant aux diplomates de ce dernier pays leur prosélytisme politico-religieux effréné. Il est clair cependant que l’irruption d’un nouvel acteur militaire dans une crise aussi volatile que celle du Sahara est potentiellement explosive.Un million de tonnes d’armes ont disparu des arsenaux libyens après la chute de Kadhafi avant d’être disséminées dans toute la région*. Dans ce contexte, vouloir venger une extradition et « punir » un État pour son influence en matière de propagation d’un islam des lumières en jetant de l’huile sur les braises relève de la pyromanie.
* Lire à ce sujet le constat alarmant du Project Safte (UE/Sipri) : « Illicit firearms circulation in North Africa » (avril 2018).

Maroc-Iran : les dessous d’une rupture - Jeune Afrique.com
Le Maroc a rompu ses relations diplomatiques avec l’Iran le 1er mai, arguant du soutien militaire de Téhéran au Polisario. Les pièces du dossier d’accusation que Nasser Bourita a présenté à Javad Zarif et que JA a pu consulter sont troublantes.