A Budapest, sur les bords du Danube, les mines des représentants des principales associations juives européennes paraissent graves. Réunis en Congrès en Hongrie les 20 et 21 juin, ils décrivent une montée franche de l'antisémitisme pendant la pandémie, avec une explosion des théories du complot accusant la communauté juive. Comme le montre l'affaire de la fresque d'Avignon cette semaine, une peinture représentant Emmanuel Macron manipulé par l'économiste Jacques Attali, la France n'est pas épargnée par cette poussée antisémite.
La France, elle, constitue un cas à part, "une anomalie" selon Daniel Staetsky. "Les Français, dans leur très grande majorité, ne sont pas antisémites et les autorités françaises font un excellent travail pour protéger les communautés juives, l'un des tout meilleurs en Europe, explique le chercheur. Le seul moyen de s'améliorer serait de coller un soldat derrière chaque juif !"
Mais la France est aussi le pays où la communauté juive se sent le moins en sécurité, très loin derrière nos voisins. "Les juifs français sont extrêmement inquiets, à un niveau incomparable avec le reste des autres pays européens, souligne Daniel Staetsky, étonné par ces chiffres au début de son étude. Ils ressentent un antisémitisme très fort et ils pensent que ce phénomène augmente." Dans les faits, ils sont pourtant 69% à se dire non concernés par des actes antisémites, un niveau comparable à l'Autriche ou au Danemark.
Présent en Hongrie pour la remise du rapport, Joël Mergui se dit préoccupé par ces chiffres. "Il semble que les juifs de France ne se sentent pas en sécurité, avec un sentiment au plus bas de l'échelle en Europe, souffle le président du Consistoire israélite de Paris et d'Ile-de-France. Je crois qu'il correspond à un sentiment prémonitoire du judaïsme français. On parle trop peu de la montée des populismes en Europe. Or, ceux qui ont le baromètre du populisme, ceux qui le ressentent dans la rue, ce sont les juifs. En France, on a senti ces dernières années, élection après élection, monter les extrêmes, l'extrême droite et l'extrême gauche."
Après les attentats antisémites, contre l'Hypercacher en 2015 ou l'école juive Ozar Hatorah de Toulouse en 2012, les lieux de vie de la communauté juive ont été placés sous haute protection par les autorités françaises. "Ces mesures sont prises, mais elles ne sont plus très visibles, estime Joël Mergui. La France a considéré qu'il était plus efficace d'avoir des gardes mobiles que des gardes statiques, ce qui fait que les juifs qui arrivent dans un lieu ne voient plus la police ou les soldats. Donc ils sont davantage inquiets."
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La France, un cas à part
Pour la première fois, lors de ce Congrès, la European Jewish Association a dévoilé un index de qualité de la vie juive en Europe. Ce classement des pays européens mêle plusieurs facteurs comme la lutte contre l'antisémitisme, la sécurité ou le respect de la liberté religieuse. D'après cette étude, menée pendant deux ans par le statisticien britannique Daniel Staetsky, du Jewish Policy Research, les nations les plus bienveillantes à l'égard des communautés juives seraient l'Italie et la Hongrie, les moins bienveillantes la Belgique et la Pologne.La France, elle, constitue un cas à part, "une anomalie" selon Daniel Staetsky. "Les Français, dans leur très grande majorité, ne sont pas antisémites et les autorités françaises font un excellent travail pour protéger les communautés juives, l'un des tout meilleurs en Europe, explique le chercheur. Le seul moyen de s'améliorer serait de coller un soldat derrière chaque juif !"
Mais la France est aussi le pays où la communauté juive se sent le moins en sécurité, très loin derrière nos voisins. "Les juifs français sont extrêmement inquiets, à un niveau incomparable avec le reste des autres pays européens, souligne Daniel Staetsky, étonné par ces chiffres au début de son étude. Ils ressentent un antisémitisme très fort et ils pensent que ce phénomène augmente." Dans les faits, ils sont pourtant 69% à se dire non concernés par des actes antisémites, un niveau comparable à l'Autriche ou au Danemark.
D'après le rapport de l'Institute for Jewish Policy Research, publié en juin 2022, le sentiment d'insécurité est au plus haut dans la communauté juive de France.Institute for Jewish Policy Research
Présent en Hongrie pour la remise du rapport, Joël Mergui se dit préoccupé par ces chiffres. "Il semble que les juifs de France ne se sentent pas en sécurité, avec un sentiment au plus bas de l'échelle en Europe, souffle le président du Consistoire israélite de Paris et d'Ile-de-France. Je crois qu'il correspond à un sentiment prémonitoire du judaïsme français. On parle trop peu de la montée des populismes en Europe. Or, ceux qui ont le baromètre du populisme, ceux qui le ressentent dans la rue, ce sont les juifs. En France, on a senti ces dernières années, élection après élection, monter les extrêmes, l'extrême droite et l'extrême gauche."
Une protection de moins en moins visible
D'après Daniel Staetsky, l'angoisse de la communauté juive en France s'explique principalement par la douzaine de crimes antisémites violents commis dans l'Hexagone ces dernières années, qui n'existent quasiment pas chez nos voisins. "La région parisienne est comme une Europe en miniature, avec des quartiers dans lesquels l'extrême droite est montée, et d'autres où c'est l'extrême gauche, reprend Joël Mergui. Vous avez de l'antisémitisme, de l'antisionisme, de l'islamisme radical. Comment voulez-vous que les juifs d'Europe ne soient pas inquiets ?"Après les attentats antisémites, contre l'Hypercacher en 2015 ou l'école juive Ozar Hatorah de Toulouse en 2012, les lieux de vie de la communauté juive ont été placés sous haute protection par les autorités françaises. "Ces mesures sont prises, mais elles ne sont plus très visibles, estime Joël Mergui. La France a considéré qu'il était plus efficace d'avoir des gardes mobiles que des gardes statiques, ce qui fait que les juifs qui arrivent dans un lieu ne voient plus la police ou les soldats. Donc ils sont davantage inquiets."
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Antisémitisme : en Europe, l'inquiétante anomalie française
Un nouveau rapport éclaire la situation des communautés juives dans douze pays européens. En France, le sentiment d'insécurité est au plus haut, malgré l'action des autorités.
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