TOURNANT. Alger, Niamey et Abuja se sont accordés sur la nécessité de lancer au plus vite le mégaprojet du gazoduc transsaharien.
La relance des échanges en vue de la réactivation du gazoduc Nigeria-Niger-Alger pourrait changer la donne quant à la fourniture de l'Europe par l'Afrique.
C'est un projet énergétique qui risque de bouleverser la donne dans le marché gazier entre l'
Afrique et l'
Europe. Dimanche 19 juin, les ministres de l'Énergie de l'
Algérie, du
Niger et du Nigeria ont convenu, à Abuja (
Nigeria), le lancement des études techniques du mégaprojet du Trans-Saharan Gas-Pipline (TSGP) qui reliera les champs gaziers du sud-est du Nigeria (Delta du Niger) aux terminaux algériens de la côte méditerranéenne pour être relié ensuite à l'Europe via les gazoducs vers l'Espagne et l'Italie, soit 4 100 km de pipelines. Les trois responsables, algérien, nigérien et nigérian, souhaitent concrétiser ce projet dans « les plus brefs délais ». En février dernier, les trois responsables avaient lancé, à Niamey (Niger), une Task Force chargée du suivi du projet qui fait partie des priorités du NEPAD (New Partnership for Africa's Development).
Un enjeu stratégique
D'après les estimations des experts, le gazoduc transsaharien peut être réalisé en trois ans et pourrait permettre de transporter 20 à 30 milliards de mètres cubes de gaz depuis le Nigeria. Lors des premières estimations de son coût de réalisation, datant de 2009, l'enveloppe avoisinait les dix milliards de dollars. Un coût certainement à réévaluer à la hausse, probablement le double des estimations de 2009. « La réalisation de ce gazoduc est à la portée des pays concernés d'autant plus qu'il bénéficie des opportunités offertes par l'Algérie en termes d'infrastructures à travers le réseau de transports, les stations de gaz naturel liquéfié [GNL] et les infrastructures de pétrochimie, ainsi que la position géographique proche des marchés de gaz », explique l'agence d'information officielle algérienne
APS. « Assurer l'approvisionnement des marchés et assurer un meilleur positionnement des trois pays [Algérie, Nigeria et Niger] dans l'échiquier mondial de la transition énergétique et du développement durable », sont les principaux objectifs du TSGP, selon le ministre algérien de l'Énergie, Mohamed Arkab.
« L'émergence d'un marché africain de l'énergie »
« La réactivation du projet TSGP intervient dans un contexte géopolitique et énergétique particulier, marqué par une forte demande sur le gaz et le pétrole, d'une part, et par une offre stagnante en raison de la baisse des investissements, en particulier dans l'amont pétrolier et gazier, entamé depuis 2015 », a encore expliqué le ministre algérien lors de la réunion d'Abuja. Pour Alger, ce gazoduc se présente comme « une nouvelle source d'approvisionnement des marchés, dont la demande ne cesse de croître, au vu de la place qu'occupera le gaz naturel dans le mix énergétique futur ». L'Algérie souhaite également, à travers ce projet, favoriser « l'émergence d'un marché africain de l'énergie », ainsi que « la mutualisation du génie et des moyens des sociétés nationales d'hydrocarbures, pour le développement d'une industrie indépendante ». Pour rappel, l'Afrique possède 8 % des réserves mondiales de gaz.
Retombées positives
« L'impact global de la réalisation de ce grand projet, en plus de l'acheminement du gaz vers le marché européen, sera de permettre l'alimentation en gaz naturel des régions désertiques traversées, y compris celles de certaines régions des pays voisins du tracé du gazoduc. Il permettra aussi l'alimentation sur son passage des régions du nord, du nord-est et du centre du Nigeria, ainsi que des pays du Sahel, comme le Niger, le Burkina Faso et le Mali », indique le quotidien
El Watan. « Une grande partie du coût du pipeline sera consacrée au Niger, qui bénéficiera d'importantes retombées socioéconomiques et qui pourra par la même occasion monétiser ses propres réserves de gaz », poursuit le journal algérien.