« 1 000 premiers jours » de l’enfant : la commission Cyrulnik, bénévole, ignorait que le gouvernement avait payé des consultants privés sur une mission parallèle
Le neuropsychiatre Boris Cyrulnik a rendu, en 2020, un rapport sur la petite enfance au gouvernement. Il ignorait, jusqu’à notre appel, que le cabinet privé Roland Berger avait travaillé en parallèle sur le même sujet. Une mission à 425 000 euros, dont les contours restent mystérieux.
Qui a missionné en 2019 les consultants du cabinet Roland Berger pour plancher sur les mille premiers jours de l’enfant ? Et, surtout, dans quel but, alors qu’un grand rapport sur le même thème avait déjà été commandé à
une commission d’experts menée par le neuropsychiatre Boris Cyrulnik ? Sollicité par
Le Monde, le gouvernement n’a pas été en mesure de préciser les contours de cette prestation à 425 000 euros. Un cas d’école de l’opacité qui entoure l’intervention de ces cabinets de conseil privés dans la sphère publique, qui suscite la controverse depuis
un rapport sénatorial au vitriol publié le 17 mars.
« Cela fait partie des projets dont nous sommes fiers », s’est félicité Laurent Benarousse, l’un des responsables de Roland Berger, lorsqu’il a été interrogé sur le sujet
au Sénat en janvier. Selon lui, ses consultants sont intervenus pour
« organiser au mieux pour le nouveau-né, mais aussi pour la maman, l’accès aux services publics ».
Ce travail a beaucoup moins convaincu au sein de l’Etat. Les différentes missions du cabinet sur les « 1 000 premiers jours de l’enfant » ont reçu une évaluation moyenne de 2,5 sur 5 de la part de la direction interministérielle de la transformation publique (DITP), relève la commission d’enquête du Sénat sur l’influence des cabinets de conseil
dans son rapport. La DITP a notamment jugé que les travaux du cabinet Roland Berger n’étaient
« pas au niveau » et que son travail sur le chiffrage de différentes mesures n’était
« pas à la hauteur d’un cabinet de stratégie ».
Contacté par
Le Monde en mars, Boris Cyrulnik avait assuré ne pas être au courant de l’intervention de consultants privés sur ce dossier. Cette mission, c’est
« beaucoup d’argent perdu », a-t-il renchéri dans
L’Obs mercredi 6 avril. Signe que Roland Berger aurait été sollicité par l’Etat en parallèle des travaux du comité, et pas dans le cadre de celui-ci.