Coup d’État au Niger : « Les Occidentaux n’accepteront pas que le Niger bascule », Kalifara Séré
« Le scenario ne se présente pas comme le Burkina Faso et le Mali le souhaitent. Il y a beaucoup d’impondérables qui vont mettre le sable dans le couscous du Mali et du Burkina Faso. En ce sens que nous avons basculé dans une guerre géopolitique très claire ! ». C’est l’opinion de l’expert en stratégie territoriale, Kalifara Séré, qui a bien voulu accorder une interview en ligne à Lefaso.net sur la situation au Niger et ses incidences sur le Burkina Faso et le Mali. C’était dans la soirée du mardi 1er août 2023. Pour Kalifara Séré, les Occidentaux n’accepteront pas que le Niger bascule.
Lefaso.net : Que pensez-vous de la décision de la CEDEAO qui menace d’intervenir militairement au Niger pour restaurer le pouvoir de Mohamed Bazoum ?Kalifara Séré : Il faut savoir que la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) est traversée par divers courants d’influences géopolitiques. Il y a un courant francophone, anglo-saxon et purement américain. Et cela se ressent dans les actes et résolutions de la CEDEAO. Clairement, le dernier sommet a créé un déclic, celui de la déclaration du président entrant, le chef d’État nigérian Bola Tinubu, qui était un peu comme son discours d’investiture. Il disait à cette occasion, que certaines choses n’allaient plus être tolérées. Tous ceux qui le connaissent aussi bien ailleurs qu’au Nigéria, savent que c’est quelqu’un qui a une manière d’agir tout en tenant à marquer son territoire.
Alors, d’un point de vue strictement capacité tactique, la CEDEAO a les moyens d’intervenir au Niger. Parce que le Nigéria à lui seul, dépasse le total des autres armées en termes d’effectifs, de puissance de feu, etc. De ce point de vue, le Nigéria tout seul a les capacités de mener une opération de représailles contre l’un des États membres. À lui seul, le Nigéria fait 68% du PIB de l’ensemble de l’espace CEDEAO.
Fallait-il s’attendre à la réaction du Burkina et du Mali à travers leur communiqué conjoint ?
Peut-être pas dans cette forme mais la réaction était attendue. Parce que clairement, le Burkina Faso et le Mali étaient en attente de voir le Niger tomber dans la même situation qu’eux. Car la situation de ces deux pays était inconfortable face au président Mohamed Bazoum qui n’épousait pas leurs idéaux. Ce qui ne leur permettait pas de former un bloc homogène contre certaines mesures de la CEDEAO. Donc si le Niger rejoignait le Burkina Faso et le Mali, cela leur permettrait de devenir une entité, d’avoir une unité d’action et un bloc qui puisse s’adresser à la CEDEAO dans le cadre d’une véritable fédération militaire. Et cette synergie leur donnerait les moyens de faire valoir leurs idées. Parce que le projet de fédération avec la Guinée était tiré par les cheveux.
Cependant, le scenario ne se présente pas comme le Burkina Faso et le Mali le souhaitent. Il y a beaucoup d’impondérables qui vont mettre du “sable dans le coucous’’ du Mali et du Burkina Faso. En ce sens que nous avons basculé dans une guerre géopolitique très claire ! C’est-à-dire qu’à ce stade, la lutte d’influence est telle que les Occidentaux n’accepteront pas que le Niger bascule. Et tous les moyens seront mis pour que cela n’arrive pas.
Si effectivement, le Niger n’arrive pas à rejoindre les États malien et burkinabè, cela constituerait une position de vulnérabilité pour ces deux pays. Le communiqué conjoint est une déclaration de principe. Elle était nécessaire et aussi bonne à prendre. Mais elle n’a aucune incidence pratique de dénouement de ce qui se passe au Niger en ce moment. Parce que tout le monde sait que le Mali ou le Burkina ne s’aviserait pas de monter une opération de soutien. Car ces derniers ont d’abord du mal à assurer la permanence de leur présence sur leurs propres territoires. Donc j’estime que c’est une déclaration de principe et de solidarité.
Quels sont les risques de déstabilisation pour la région en raison de cette situation ?.................
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