Salam
La naissance du caftan.
Dans une miniature des Contes de Santa Maria, le calife Almohade apparaît dans un caftan finement brodé sur le col et sur l’avant-bras.
Il apparaît pour la première fois au 12ème siècle pendant le règne de la dynastie Almohades. Au départ, le caftan était réservé à la royauté, simple et sans ornements.
Les souverains de l’époque, prêchant le retour aux sources fondamentales de l’islam et souhaitant rompre avec l’opulence de leurs prédécesseurs Almoravides, refuseront d’employer dans leurs vêtements la soie et l’or [6].
Sous le calife Muhammad an-Nâsir, un recensement établi pour des raisons fiscales dénombrait pas moins de 3 490 ateliers de tissage [7] et comptabilisait plus de 3000 tisserands [8] à Fès.
De la sobriété au luxe.
Au fil du temps, des ateliers princiers de tissage (Tarz) dédiés en partie à la confection des caftans fleurissent, notamment sous les Mérinides. Le port du caftan commencera petit à petit à devenir courant [9]. Plus somptueux, il épousera de nouveaux tissus tels que le brocart. Ibn Khaldoun fait mention de vêtements et ceintures de soie ornée de fils d’or tissés à Fès [10], marquant ainsi la rupture avec la doctrine simpliste des Almohades.
En guise de bonnes relations, le caftan était offert comme présent aux sultans des puissances étrangères également. Une liste des cadeaux envoyés par le sultan Mérinide Abu Al-Hassan au sultan Mamelouk an-Nâsir Muhammad cite en effet des vêtements brodés d’or, des vêtements de taffetas, de laine et de soie rigide et à bigarrures [11]. Les sultans de la dynastie mérinide envoyaient également des vêtements luxueux aux sultans Ottomans [12], ces derniers les nommant Fas Kaftanlar en référence à la ville de Fès.
La civilisation Mérinide, qui avait établi sa capitale à Fès, connaissait donc un rayonnement industriel, intellectuel et culturel prestigieux, si bien que les rois Nasrides de Grenade imitaient ceux de Fès. [13]
Caftan du sultan Abu Abdallah Muhammad XII, musée de l’armée, Tolède.
La démocratisation du caftan.
Vers la fin du XVème siècle, le caftan prend une nouvelle tournure avec l’arrivée massive au Maroc des Andalous chassés d’Espagne. Ils s’installent principalement à Tétouan et à Fès mais aussi à Chefchaouen, Rabat et Salé.
Les Andalous emportent avec eux leur savoir-faire qui se fond harmonieusement à la culture et l’art marocain. Cette influence andalouse se manifestera principalement par ses apports à la broderie. La culture hispano-mauresque sera très bien préservée au Maroc, à tel point que chaque ville aujourd’hui cultive son propre style de broderie.
L’ère Saadienne révolutionnera cependant l’usage de ce vêtement. Les femmes se l’approprieront, ce qui marquera donc le début de la féminisation du caftan [14]. Cette demande féminine sera également très forte poussant ainsi l’innovation en ce qui concerne l’usage de nouveaux tissus et ainsi de suite [15].
Du côté masculin, le caftan sera confectionné avec un drap importé de l’Angleterre dénommé
brown blues. Le bleu foncé de ces variétés de draps deviendra pour la classe aisée la couleur nationale du vêtement [16].
Le sultan Ahmed Al Mansour instaure la mode d’une tunique transparente par-dessus le caftan traditionnel qu’on surnomme
mansouria en référence à son nom [17]. Cette tenue, connue sous le nom de
takchita, est donc composée de deux pièces contrairement au caftan : la 1ère est la tahtiya et la seconde se nomme fouqia ou dfina ou alors mansouria.