Quelques morales islamique

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L'amputation était une pratique tribale communément pratiquée par les truibus bédouines qui, en l'absence de trinbunaux et de toute forme de justice organisée, choisissaient souvent ce moyen pour régler les vols entre tribus afin de ne pas mettre le voleur à mort et de préserver une paix tribale.
Je tr'invite à lire les ouvrages d'histoire de Mohamed Arkoun pu de M. Charfi- pour ne citer qu'eux - pour t'en convaincre. Je doute que tu le fasses mais au moins je te montre la voie.

Deux "historiens" contemporains... Impossible de les prendre comme sources.

Tant mieux si tu le fais aussi. Mais j'ai surtout l'impression en te lisant que tu adhères de très près au discours de la théologie dominante et de son approche littéraliste et intemporelle.

La théologie dominante ne rejette pas les hadiths. Ta critique est fausse et vaniteuse.
 
Deux "historiens" contemporains... Impossible de les prendre comme sources.

Oui, d'accord :).

La théologie dominante ne rejette pas les hadiths. Ta critique est fausse et vaniteuse.

Et ce n'est pas même la question. On ne parle pas de rejet ou d'acceptation de hadiths, essaie de mieux suivre ou absiens-toi. On parle de lecture lirtéraliste et non-reconnaissante d'une dimension de temporalité à la forme du Coran.
 
Oui, d'accord :).



Et ce n'est pas même la question. On ne parle pas de rejet ou d'acceptation de hadiths, essaie de mieux suivre ou absiens-toi. On parle de lecture lirtéraliste et non-reconnaissante d'une dimension de temporalité à la forme du Coran.

J'ai tout suivi ne t'inquiète pas tu n'es pas ma prof. Mais ce que tu comprends pas c'est que tu essaye de la caser comme proche de la théologie contemporaine. Et d'ailleurs j'ai remarqué que tu t'attaques souvent en émettant des jugements sur ceux qui débattent avec toi, c'est très vaniteux et arrogant. N'oublie que c'est souvent l'arrogance et la vanité qui ont donnés et qui donnent toujours des mécréants.
 
J'ai tout suivi ne t'inquiète pas tu n'es pas ma prof. Mais ce que tu comprends pas c'est que tu essaye de la caser comme proche de la théologie contemporaine. Et d'ailleurs j'ai remarqué que tu t'attaques souvent en émettant des jugements sur ceux qui débattent avec toi, c'est très vaniteux et arrogant. N'oublie que c'est souvent l'arrogance et la vanité qui ont donnés et qui donnent toujours des mécréants.

Sages paroles :cool:
Bonne soirée
 
@ Sinear :

Tant mieux si tu le fais aussi. Mais j'ai surtout l'impression en te lisant que tu adhères de très près au discours de la théologie dominante et de son approche littéraliste et intemporelle.

Ce n'est pas parce que je partage avec elle ce point que j'adhère à tout ce qu'elle dit. En fait, la grosse majorité des musulmans croit en l'intemporalité du Coran, tout courant confondu.

L'histoire est ré-écrite... ici on parle de traditions sociales, et tu parles d'histoire ré-écrite. Ok, alors considères-tu logique selon ton raisonnement de douter de l"histoire qui nous dit par exemple sous les pharaons, le peuple disposait de formes d'actions sociales tolérées, comme le droit de grève ?


Je crois que tu n'as pas saisi mon propos. Je lis l'Histoire avec énormément de recul car l'Histoire n'est pas fiable à 100%, (elle l'est peut-être à 50%??) bref c'est clair et net et tous les témoignages qui se contredisent et les nouvelles recherches contredisant de plus anciennes le prouvent. Mais en fait, je m'en fous. Tu vois, ça n'apporte rien à ma foi et ma pratique cultuelle de savoir si l'Histoire est ré-écrite ou pas. Là on parle de ce qui relève du sacré, du divin, du salut de l'âme, du religieux. Aucune comparaison n'est possible. En matière de religion il est primordial d'utiliser des textes "fiables" à 100% sinon on s'égare.

Le Coran n'affirme pas non plus que la lapidation ait été pratiquée avant l'Islam et cependant elle se pratiquait à l'époque du Christ déjà. Un épisode de la Bible elle-même y fait alluision (celui de la femme adultère). Ca répond à ta remarque ?

Le Coran ne parle pas de lapidation du tout en tant que loi donc bon.
Ca ne répond pas à ma remarque. Tu as dit que l'amputation était appliquée avant le Coran (quelle preuve as-tu?) et en cela il est légitime de penser qu'elle ait été descendue en tant que loi au peuple de l'époque. Je t'ai demandé pourquoi ce qui semble obsolète voir barbare maintenant ne l'aurait-il pas été à l'époque ? Les gens de l'époque étaient-ils moins sensibles ? J'ai déjà lu Charfi (pas Arkoun) et Benzine qui ont des propos assez similaires. Ils ne m'ont pas convaincu parce que, comme toi, leur raisonnement est paradoxal.

Je suis désolée mais pour savoir comment contextualiser un verset il faut se référer aux causes de la Révélation (sabab an nouzoul). Or cela ne se trouve que dans les hadiths. Or, il me semble que tu n'accordes pas de crédit à TOUS les hadiths, il y en a que tu critiques avec virulence n'est-ce pas ? Donc comment d'un côté tu te permets d'en rejeter à ta guise et selon ton ressenti et ta sensibilité et d'un autre côté tu les utilises obligatoirement pour "contextualiser" ?

Ton raisonnement est paradoxal. Et il ouvre la voie à tout et n'importe quoi. En gros, ça revient à cette phrase toute simple "on rejette ce qu'on veut et on garde ce qu'on veut".

Les hadiths ne sont PAS le claé de la contextualisation, visiblement tu ne le saisis toujours pas où alors tu déformes à dessein la réalité Celle-ci consiste dans l'application des sciences humaines, l'étude des sciences de la révélation et l'étude du contexte des élaborations théologiques passées.


Sans les hadiths, tu n'as AUCUN moyen de savoir quelles sont les sciences de la révélation. Quant aux élaborations théologiques passées, elles sont le fruit des études de nombreux savants et les dires de ces savants sont compilés et rapportés au même titre que les hadiths dits "prophétiques".



Ta "contextualisation" se base sur quelque chose de purement humain. Tu as plus de risques d'être complètement à l'ouest que proche d'une certaine vérité. L'humain est faillible.

C'est totalement faux, il existe des sources pré-islamiques émanant d'arabes ou de non-arabes qui ont relaté les modes de vie de la pénisule et les traditions culturelles qu'ils avaient.


Il y en a très très peu (dont le Coran lui-même). Mais je suis curieuse de voir tous ces historiens qui ont relaté l'Histoire de la civilisation pré-islamique sans avoir pioché dans les corpus de hadiths.
Il y a effectivement des arabes pré-islamiques qui ont laissé des récits. Mais ces récits ont été compilés par ceux-là même qui ont compilé les hadiths.
 
Comme tu le choisis visiblement, je gage que mêmes des références d'ouvrage ne te convaincront pas.

Si tu en as, j'aimerais les connaître, qu'on en finisse avec cette question.

Si le Coran avait parlé de prisons et de mises en liberté conditionnelles, personne ne l'aurait compris. Le disocurs est adapté à la réalité sociale de ceux qui le recouvent.

Et pourquoi pas ? Il y a des choses dont le Coran a traité et qui sont nouvelles pour les moeurs de l'époque pourtant (héritage des femmes, code vestimentaire, réglementation du pèlerinage et de l'impôt, divorce etc...).

En fait ce que tu essaies de dire c'est que si le Coran stipule le fouet ou l'amputation c'est pour ne pas choquer les moeurs de l'époque, pour rallier les gens à sa cause car ces législations ne leur étaient pas étrangères ?

Maintenant dis moi : quelles sont les preuves écrites et datées qui prouvent que le fouet et l'amputation par exemple aient été pratiqués avant l'islam ?

Ensuite j'aimerais comprendre ceci : comment peut-on croire qu'un Dieu, par définition Sage et Juste, puisse envoyer des lois dans un but uniquement stratégique et ce malgré le caractère particulièrement sévère de ces lois ? Pourquoi les gens de l'époque ont-ils du subir ces lois contrairement aux gens de maintenant qui ne devraient pas ?

Le discours contient deux éléments : une forme et un fond. Tu choisis de figer les deux, là ou d'autres perçoivent la temporalité historique de la première et privilégient donc le second, en ne le rendant pas prisonnier d'une mise en pratique condamnée à ne plus jamais évoluer.

Il y a des versets clairement contextuels dans le Coran mais on le sait, le verset lui-même le suggère (par exemple les versets sur les batailles...). Et il y a d'autres versets qui n'ont absolument pas besoin d'être "revisités" car ils sont déjà clairs.

Il y a également des thèmes qui ne sont pas traités dans le Coran mais on a des indices, des principes qui nous guident afin que l'on puisse y apporter des réponses. Donc non la vision "littéraliste" ne fige pas le Coran, si le Coran était "figé" il serait temporel, or la définition même de l'intemporalité c'est d'être valable quel que soit le temps.
 
Salam Shehzad,

Voilà, je trouve enfin le temps de répondre de manière complète à ta dernière intervention. Tu y poses un certain nombre de questions et je vais tenter d’y répondre ici de manière structurée.

Je te propose de procéder en 3 temps : tout d’abord, rectifier certaines des erreurs que tu cites au sujet de la méthodologie de travail des islamologues modernes de l’Islam ; ensuite te citer les éléments factuels historiques qui démontrent le caractère préislamique de certaines pratiques mentionnées dans le Coran et qui, de là, permettent d’en démontrer la temporalité au niveau de la forme ; et enfin, décrire la manière dont la prise en compte des éléments de temporalité et de circonstantiation dans la lecture du Coran, permet une forme d’exégèse renouvelée.

Premier point donc, les erreurs que tu cites quant à la méthode : en gros tu reproches aux savants d’utiliser les hadiths dans l’application de Azbab Al-Nuzul, tout en réfutant certains d’entre eux. Tu commets en fait une erreur de perception : les sciences de la révélation se basent sur les Tafsir, les Sira, auxquels les hadiths servent de base, et les récits des compagnons du Prophète. Les islamologues qui utilisent ces sources afin de déterminer le contexte de descente de tel ou tel verset ne réfutent pas, contrairement à ce que tu dis, la véracité des hadiths, même s’il est évident – mais pour tout le monde ici – qu’un certain nombre de hadiths ont été inventés. Là où ils divergent par rapport au courant classique, c’est seulement dans l’instrumentalisation et le caractère normatif attribué à ces hadiths. Ce qui est tout différent de ce que tu affirmes. Etre en discordance avec l’interprétation des hadiths ne signifie nullement nier leur authenticité. La plupart de ces islamologues sont du reste sunnites, c’est-à-dire reconnaissent Coran et Sunna.

L’étude des circonstances de la révélation œuvre essentiellement donc autour des circonstances factuelles qui ont entouré la descente des versets. Celles-ci relèvent de la Sira pour une partie, des hadiths, du Tasfir ou des témoignages des compagnons. Elles permettent de comprendre le contexte dans lequel des versets ont été descendus. L’étude de cette science permet de percevoir la présence du temporel dans un texte censé être intemporel au niveau de sa forme (pas de son essence). Par temporel, on entend la relation entretenue entre le contenu du verset d’une part, et les personnes, les évènements et les circonstances de vie du Prophète d’autre part. Du reste, tu ignores peut-être que les savants classiques de l’Islam reconnaissent eux-mêmes cette science, et l’appliquent. Simplement, ils divergent dans la manière d’expliquer cette « temporalité » présente au sein des versets du Coran. Les explications qu’ils fournissent sont de deux types : tout en reconnaissant la concomitance entre des versets et des circonstances temporelles survenues au cours de la Révélation, ils considèrent qu’il ne s’agit que d’une coïncidence non-obligée, ce qui revient en gros à dire que même sans cette circonstance, le verset serait descendu sous une forme identique. Une autre réaction est d’affirmer que Dieu aurait « choisi » de créer des circonstances temporelles pour encadrer la descente d’un verset, afin de mettre les croyants en « situation » de comprendre celui-ci. Or ces deux explications sont insatisfaisantes. Au-delà des liens directs que le texte entretient avec le quotidien du Prophète, par exemple les questions posées à celui-ci par ceux qui doutaient de lui et auquel le Coran donnait réponse (« Réponds-leur », « Dis-leur »,…) , le Coran contient des références directes à des personnes et des évènements survenus avant et pendant le temps de la Révélation : entre autres la bataille de Badr, de Haunayn, le compagnon Ibn Maktûm ou Abu Lahab, pour ne citer qu’eux. Comment alors rendre compte de la présence de cette « temporalité » selon la vision qui consiste à penser que le texte du Coran est incréé, éternel, préexistant à la création, et que sa forme est indépendante des circonstances de la Révélation, comme le prétend l’orthodoxie classique ?

Je ne sais pas si tu as des connaissances en philo, mais ici intervient le concept ontologique de distinction entre nature divine et nature de sa création humaine. Si tous les évènements, les circonstances et les personnages du Coran relèvent d’une intemporalité ontologique comme l’est celle de Dieu - ce qui est la conséquence logique à laquelle amène la position des savants classiques - alors on en arrive à nier la différence entre Dieu et ces évènements qui participent de sa création, ce qui est contradictoire avec l’altérité absolue de Dieu telle que défendue par tout le discours coranique et reconnue par les savants eux-mêmes. Ceux-ci en viennent donc à se contredire par souci de ne pas reconnaître le caractère de temporalité au discours coranique.
 
Pour terminer ce premier point, je te dirais aussi que cette position que tu défends, et qui est celle de l’Islam classique contemporain, n’a pas toujours été l’unique conception. Elle-même est le fruit d’un rapport de forces historique entre des courants doctrinaux différents. La logique que je t’ai exposée ci-avant avait déjà été tenue aux premiers âges de l’Islam, pour une partie significative, par les mutazilistes, qui défendaient le caractère créé du Coran, pour les mêmes raisons. Mais ceux-ci ont été défaits, après une période ou leur doctrine était dominante en l’Islam, par les acharites et les hanbalites qui, eux, défendaient la thèse du Coran incréé.

Tu vois donc que ce en quoi tu crois n’a pas toujours été une évidence partagée par tous. C’est un courant qui s’est imposé par rapport à un autre, d’une manière qui, du reste, n’a pas relevé que du discours théologique pacifique. Après leur victoire sur les mutazilistes à la fin 9ème siècle sous le calife al-Mutawakkil, les adeptes de la thèse adverse ont détruit les travaux de ceux-ci et verrouillé soigneusement les portes de la contestation théologique. Quiconque niait désormais le caractère créé du Coran était déclaré hérétique. Malgré un certain regain quelques siècles plus tard, le courant mutaziliste a disparu au 13ème siècle, et le sunnisme contemporain, héritier des tendances dominantes, a partagé ces visions sans jamais plus les remettre en cause.

Je t’invite pour mieux comprendre ce que je dis ici à lire l’ouvrage « Penser le Coran », de Bahgat Elnadi et Adel Rifaat. Tu peux aussi visionner cette vidéo, qui est une interview d’un de ses auteurs : http://oumma.com/spip.php?page=oummatv-article&id_article=3468.



J’en arrive à présent au second point, celui des faits historiques dont tu doutes qu’ils aient été antéislamiques.
Commençons par l’amputation :
Tu en trouveras une preuve dans le lien suivant, section II 1), pp 9-11:
http://www.jurisdoctoria.net/pdf/numero3/aut3_TOUALBI.pdf
Je te cite le passage qui relève de ce dont on discute :
« Dans cette configuration pénale antéislamique, le premier constat qui nous interpelle est l’absence de toute institution carcérale. Les peines pénales se résumaient alors soit à l’exil et à l’amputation, soit à la flagellation et à la vengeance du sang.
(…)
Pour ce qui est du vol, c’est sans doute en raison de l’accroissement de la pauvreté au sein de la communauté mecquoise et de l’anéantissement des valeurs tribales, que beaucoup de mendiants commencèrent à s’adonner au brigandage.
L’exégète El-Qurtubî (1268) nous apprend que face à cette situation particulière, c’est El-Mughirat Ibn El-Walid, un notable de la Mecque, qui décida un jour de trancher la main du voleur (19). Cette pratique aura tôt fait de s’enraciner dans les usages des Arabes avant d’être, comme nous le verrons plus loin, confirmée par la Charia"

La source citée est M. QURTUBI, Les Lois du Coran, (el djami’fî ahkêm el qur’ân), Le Caire, Dar-El-Kutûb, 1967, t. 6, p. 160

Si tu veux d’autres historiens affirmant la même chose, en voila une liste bibliographique succincte :
• Mohamed Charfi, Islam et liberté », pp 97-99
• M.M. Bravmann, The spiritual background of early islam, : studies in ancient arab concepts, Leiden, 1972.
• Lammens, Le berceau de l'islam. L'Arabie occidentale à la veille de l'hégire, Beyrouth, 1928,
• CARDASCIA, Guillaume, "La peine dans les droits cunéiformes" dans La peine, Première partie: Antiquité / Punishment - First Part: Antiquity, Bruxelles: De Boeck Université, 1991, 199 p., aux pp. 37-49, (Collection; Recueils de la Société Jean Bodin pour l'histoire comparative des institutions; vol. 55), (series; Transactions of the Jean Bodin Society for Comparative Institutional History; vol. 55), ISBN: 2804115232;
• BONTE (Pierre), La quête des origines, Al-ansâb : anthropologie historique de la société tribale arabe : [mélanges pour Mokhtar Ould Hamidoun] / Pierre Bonte, Édouard Conte, Constant Hamès… [et al.], Paris, Éd. de la Maison des sciences de l’homme, 1991, 260 p. Bibliogr. ISBN 2-7351-0426-5.
 
Tu le vois, les sources ne manquent pas. A ce sujet, j’aimerais te faire aussi une remarque corrective concernant les mises en doute de principe que tu émets lorsque les conclusions de l’histoire te déplaisent. Tu verses dans l’argument un peu bateau que l’histoire est incertaine parce que « ré-écrite ». Dire cela est commettre une naïveté de taille en te servant d’un argument passe-partout, sans doute imputable au fait que tu ne sois pas historienne et que donc tu ignores leur méthodologie. Le phénomène auquel tu fais allusion concerne non pas les éléments factuels, mais l’interprétation des évolutions historiques selon le camp auquel appartient celui qui les relate. Cela est une évidence que personne ne nie, mais il appartient précisément à l’historien de contourner cet écueil en et en poussant ses travaux d’investigation de manière à confronter et recouper les sources. Mais en tout état de cause, les éléments factuels n’ont rien à voir avec cette déformation à laquelle tu fais allusion. Si par exemple les récits et les interprétations sur les croisades ont varié selon les sources, chrétiennes ou musulmanes, cela ne remet pas en cause le fait par exemple que les musulmans utilisaient le pigeon voyageur pour s’envoyer des messages d’une ville à l’autre. Il s’agit là d’un élément de fait, non d’une orientation donnée aux agissements des uns et des autres. C’est ce dernier point qui est plus souvent repris dans l’expression que tu cites d’histoire réécrite. Mais il faut rester sérieux et ne pas tout mélanger ni mettre en doute au moyen de formules « bateau » les faits avérés qui déconcertent par rapport à la vision que l’on voudrait entretenir du Coran.

La réalité de l’amputation est avérée par tous les historiens. En la niant, tu entres dans une logique qui consiste à nier leur travail et leurs sources, et tu t’isoles dans une position qui n’est guère crédible ni défendable.

Ceci posé, continuons.


Nous avons aussi parlé de la lapidation et de la flagellation, mentionnées dans le Coran ou les Hadiths, et dont tu doutais aussi qu’elles soient antéislamiques. Un petit tour sur wikipédia te suffira déjà à te convaincre qu’elles étaient pratiquées en Grèce antique, chez les juifs et les premiers chrétiens. Tu y verras toutes les sources que tu désires. Comme je t’ai déjà dit, un passage de la Bible y fait allusion, celui de la femme adultère sauvée par Jésus des pharisiens qui voulaient la lapider. Je gage que tu ne devrais pas le remettre en cause celui-là au moins, ou alors il faudra nous expliquer dans quelle intention la réalité de l’existence avant l’Islam des châtiments corporels auxquels il est fait allusion dans le Coran auraient été « inventée ».

Continuons ensuite avec la polygamie. Au-delà des recherches que tu pourrais faire toi-même sur la question, voici deux sources qui mentionnent elles-mêmes que la polygamie était pratiquée avant l’Islam
http://www.islamreligion.com/fr/videos/326/
http://www.womeninislam.ws/fr/la-polygamie.aspx
Tu noteras qu’il s’agit de deux sources islamiques. Je gage que celles-là, au moins, tu ne devrais pas les mettre en doute ;).
UN passage de l’un d’eux :
Dans la période de l’ignorance préislamique, la polygamie était très répandue dans les tribus arabes sans aucune limitation. L’homme pouvait épouser autant de femmes qu’il voulait. Quand l’Islam arriva, il permit la polygamie tout en lui assignant des conditions et des principes à observer.

On pourrait ajouter aussi l’esclavage, qui est mentionné dans le Coran et qui constitue une autre preuve de l’historicité de la forme de son discours. Il va de soi que l’esclavage sous la forme décrite dans le Coran n’existe plus de nos jours. Que conclus-tu des versets sur l’esclavage ? Crois-tu qu’il y ait lieu de les appliquer à la lettre également, réinstaurer l’esclavage afin de disposer de « bons points » si l’on se comporte bien avec ses esclaves ? Il va de soi que non. Cet exemple parmi les autres démontre l’adéquation de la forme du discours coranique avec la situation sociale, culturelle et morale qui prévalait en Arabie au temps de la Révélation.
 
Tu citais aussi l’exemple des droits de la femme qui étaient novateurs. En effet, ils l’étaient, mais pas de manière absolue. Ils l’étaient par rapport à la situation préislamique qu’ils venaient corriger. La polygamie a été limitée à 4 épouses et assortie de conditions drastiques. Le statut et les droits de la femme, quasi-inexistants en situation préislamique, ont été rehaussés. Par exemple, donner plus d’héritage aux garçons qu’aux filles s’expliquait par la coutume de la dot et l’obligation astreinte aux hommes de subvenir aux besoins de leurs épouses dans un contexte où celles-ci ne travaillaient pas. Mais dès lors que les circonstances qui ont prévalu à ces lois disparaissent de par l’évolution naturelle du monde, la forme de ces préceptes se doit évidemment de s’adapter. Simplement parce que ce qui compte est ce qu’ils visent, leur finalité sociale, et non la manière dont ils le font. Dans nos sociétés contemporaines où la femme est souvent active et où la monogamie est la norme, il n’y a plus guère de raison de perpétuer cet héritage déséquilibré. Ce qui doit perdurer en revanche est l’esprit du texte, son dessein que l’on peut saisir en comprenant la situation initiale qu’il venait corriger.

Une exégèse moderne se doit d’inclure la prise en compte de cette évidence dans sa pratique, plutôt que de s’en tenir à une fidélité aveugle aux élaborations théologiques du passé. Celles-ci ont été produites dans un cadre socio-culturel qui n’est plus celui où nous vivons aujourd’hui. Elles ont été de surcroît orientées par la conception dont je parlais plus haut, celle de la nature incréée du Coran qui amène à privilégier autant la lettre que l’esprit, et à vouloir maintenir en état, à toutes époques et tous contextes, des réglementations et des pratiques qui valaient pour le contexte de l’Arabie du 7è siècle. Or rien ne permet objectivement de considérer que la société arabe de l’époque représentait un « sommet » d’achèvement de la moralité, que toutes les autres époques n’auraient alors qu’à copier. Prétendre cela revient à nier le propre même de l’humanité, à savoir l’évolution naturelle. Si les premiers temps islamiques ont vu un recours massif au Coran et à la sunna comme bases de la législation, c’est aussi parce que les premiers musulmans étaient en quête d’une légitimité législative pour composer un code légal en l’absence de toute autre forme de législation préexistante. Mais ces conditions sont elles-mêmes le fruit des circonstances de l’époque, et non un modèle de conditions qui devrait s’imposer à toute époque et tout contexte.

Moderniser l’exégèse, c’est redonner vie à l’Ijthihad et à la réflexion critique sur l’interprétation des textes, décrétée achevée au 13ème siècle par les ulémas, entre autres comme suite d’un mouvement de repli identitaire consécutif au choc moral subi par la perte de Bagdad et de plusieurs autres cités faces aux hordes asiatiques, qui ont vu la mort d’un grand nombre d’Ulémas.
 
J’en arrive à présent au troisième et dernier point de ma réponse.

Que peut-on conclure de ces éléments ? Quelle est l’influence sur la critique exégétique sur de l’évidence de la présence du temporel dans le Coran, ainsi que de l’adéquation de la forme du discours avec la situation socio-culturelle du lieu et de l’époque ?

On peut voir le Coran comme une percée spatio-temporelle d’une révélation divine, exprimée sous une forme intelligible à ses récipiendaires, c’est-à-dire utilisant le référentiel social, moral et culturel qui était celui des arabes de la péninsule au 7è siècle. Tout discours divin, dans les trois monothéismes, s’est toujours exprimé sous une forme adaptée à l’auditoire qui le recevait. La volonté, en exégèse islamique, de se soustraire à cette réalité et à en nier les éléments probants, participe d’un choix humain, non d’une prérogative divine. C’est là que des sciences humaines telles l‘anthropologie, l’histoire et l’historiologie peuvent contribuer à éclairer ce contexte historique et moral qui était celui de la réception du message, afin de délivrer l’essence de celui-ci des interprétations figées qui se le sont appropriés pour le confisquer à la raison critique et à la recherche.

Comme le disait le savant Fazlur Rahman, le Coran est une révélation divine qui apporte un message éternel mais adapté, dans sa formulation, à la situation morale de l’Arabie du 7ème siècle. Le fait de l’interpréter autrement, en sacralisant la lettre autant que sa finalité, relève historiquement, ainsi que je l’ai expliqué plus haut, d’un choix humain d’exégèse, et n’est pas la manière « obligée » de considérer le rapport à la révélation. C’est simplement celle qui s’est imposée dans l’exégèse dominante par un processus historique, ainsi que dans l’enseignement religieux contrôlé par les savants d’Al-Azhar, et dans l’esprit d’une majorité encore de musulmans soumis à cet enseignement.

Ici il s’agit de ne pas se méprendre sur le sens des mots: refuser la lecture littéraliste du Coran ni signifie pas trahir l’Islam. Cette approche d’autre part ne concerne pas la partie spirituelle du Coran, laquelle est évidemment intemporelle. Elle concerne la partie normative, et consiste simplement à refuser de voir l’intemporalité du Coran dans sa forme normative. Elle réfute aussi la lecture fondamentaliste qui consiste à figer la forme de la lettre du texte et à la décréter aussi sacrée que la finalité qui l’anime. Or cela est criminel en Islam de nos jours, autant pour la fausseté des bases théologiques à cette approche, que par rapport à l’avancée de l’esprit critique et la capacité de la religion à apporter des réponses satisfaisantes à un environnement en perpétuelle mutation. Maintenir par exemple des pratiques avilissantes comme les châtiments corporels du 7è siècle est indigne pour l’humanité et le respect de sa naturelle évolution morale. D’autre part, figer une compréhension donnée condamnée à ne plus jamais évoluer participe à la stagnation des sociétés musulmanes, enfermées souvent dans une soumission intellectuelle et l’adoption d’un prêt-à-penser religieux qui leur dicte que faire et que croire sans participation du libre arbitre ni de la liberté de conscience. C’est cette interprétation-là de l’Islam qu’il s’agit de réformer, celle qui s’octroie le monopole de la pensée et qui se contente de régurgiter sans questionnement ni esprit critique, les productions théologiques du passé conçues par des savants dans un cadre moral, social, et interprétatif donné, et auto-sacralisé.

Comme l’écrivait Farid Esack (je te conseille la lecture de ses ouvrages), comprendre le Coran, c’est d’abord comprendre le sens des versets par rapport au contexte de leur révélation et de la situation qu’ils venaient corriger, pour être ensuite capables de transposer l’enseignement de ces versets à un autre contexte, sans fidéisme inutile à la lettre. C’est aussi la théorie de la lecture vectorielle du Coran, formulée par le tunisien Tahar Haddad et reprise par des penseurs contemporains comme Mohamed Talbi, K. Souroush ou A. Charfi.

J’espère avoir répondu à tes questions. Désolé pour la longueur, mais le sujet ne se prête pas à la brièveté :)

Bonne soirée.

Salam.
 
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