L’aide financière apportée par les Rothschild et le baron de Hirsch assure la survie de la communauté juive marocaine. Le règne de Moulay Hassan permet aux Juifs de connaître une brève accalmie avant une fin de siècle tragique. Les émeutes de Sefrou font plus de quarante victimes juives, le mellah de Mogador est pillé, les juifs de Fès, Meknès et Marrakech sont persécutés. Lors du protectorat français, en 1912, l’insurrection éclate, les musulmans s’en prennent aux Juifs et les massacrent.
L’Alliance israélite continue le processus de francisation des Juifs. Des mouvements sionistes se développent et organisent une conférence à Casablanca en 1930. En 1939, des centaines de Juifs s’engagent dans l’armée française. Sous Vichy, le Statut des juifs est voté en 1940 mais son application reste modérée.
Le sultan Mohammed V protège la communauté et déclare : « Il faudra prévoir vingt Étoiles jaunes supplémentaires pour moi et ma famille.»
Après le débarquement américain en 1942, la communauté du Maroc se reconstruit. Dès la proclamation de l’État d’Israël en 1948, un climat de tension s’installe. Au Maroc, Oujda devient la plaque tournante d’un mouvement d’alyah clandestine. Des incidents sanglants ont lieu. En 1949, plus de huit mille personnes partent en Israël. Lors de l’indépendance du Maroc en 1956, les Juifs occupent des postes importants dans le gouvernement et l’administration marocains. Mais les difficultés intérieures, la méfiance vis-à-vis des Juifs qui soutiennent Israël et l’instabilité politique poussent les Juifs à quitter le Maroc pour la France, Israël, le Canada et les États- Unis. En 1977, il ne reste plus que vingt-cinq mille Juifs.
En 1982, au sommet arabe de Fès, Hassan II présente un plan de paix. La reconnaissance d’Israël y est implicite. Il est le premier dirigeant arabe à recevoir des hommes d’État israéliens, comme Yitzhak Rabin et Shimon Peres. En 1999, Mohamed VI remplace son père. Il continue sa politique. Avec la deuxième Intifada, le processus de normalisation diplomatique entre Rabat et Jérusalem est gelé, ce qui provoque des tensions dans le pays. Robert Assaraf, de Radio Shalom, commente : «La série d’attentats en 2003 a secoué la communauté juive marocaine. Attribués à Al-Qaïda, ils ont visé des symboles, comme le cimetière de Bab Jdid et l’Alliance juive de Casablanca. Cela ne m’a pas empêché d’y retourner. Le Maroc, c’est le pays de mes racines et de mes aïeux. J’ai toujours été en contact avec les hauts dignitaires du Maroc, comme Hassan II. Lui seul a compris que la paix entre Juifs et musulmans devait passer par la paix avec Israël. »
Une communauté toujours vivante Aujourd’hui, les Juifs marocains sont des citoyens à part entière. Une petite communauté réside à Rabat, Marrakech, Agadir, Meknès. Mais c’est à Casablanca, métropole économique, que vivent quatre mille Juifs.
La communauté est structurée, avec ses différentes institutions, comme l’explique Georges Asseraf, de l’association Néomaroc : «Le Conseil des communautés israélites a créé la Fondation du patrimoine culturel judéo-marocain afin d’entretenir les synagogues et les cimetières. Il y a un réseau d’écoles et des commerces. La communauté vit en harmonie avec ses voisins musulmans mais ils ne se connaissent plus. Les jeunes voient le Juif comme un exotisme, ils ignorent l’empreinte de l’histoire juive dans la nation.
Avec la montée de l’islamisme dans les universités, des aides ont été accordées pour favoriser l’alyah. » Chaque année, les expatriés venus du monde entier se retrouvent autour de tombeaux de saints situés à Ouezzane, Essaouira ou Taroudant pour fêter la hiloula, version juive du moussem, qui rappelle les fastes du passé et commémore l’attachement à la terre des ancêtres.
Pour David Tolédano, directeur d’entreprise à Rabat, «il ne faut pas dire que c’est terminé et continuer à faire des choses ». Plusieurs associations comme, celle des Juifs de Safi et de Casablanca, ont été créées afin de faciliter les «retrouvailles» avec le Maroc.
http://www.darnna.com/histoire.htm