Les djihadistes et le conflit en Syrie : le Liban renoue avec ses vieux démons
LE PLUS. Le conflit en Syrie, qui oppose divers groupes rebelles au gouvernement de Bachar el-Assad, semble se propager de plus en plus au Liban. Le risque pour cette zone, c'est l'éclatement. Analyse de Théophane Leroux, diplômé en sciences politique, et Olivier Hanne, islamologue qui publie cette semaine "L’État islamique, anatomie du nouveau Califat".
Depuis le 24 octobre, des combats sans précédents se sont déroulés dans la deuxième ville du Liban, Tripoli, située à une quarantaine de kilomètres au sud de la frontière syrienne. Ils opposent des hommes du front al-Nosra, branche d’al-Qaïda qui se bat contre le régime syrien, et l’armée régulière libanaise.
Samedi 25 octobre, l’armée a délogé des combattants sunnites des quartiers historiques où ils avaient pris position. Ils se sont ensuite déplacés dans un quartier sunnite, où s’y échangeaient encore des tirs ce dimanche. Les civils, pris entre deux feux, fuient les zones de combat.
Une armée vulnérable
Les djihadistes, inspirés par l’extrémisme sunnite, s’en prennent à l’armée libanaise et au Hezbollah, le puissant mouvement de résistance chiite, qu’ils accusent de soutenir le régime alaouite de Bachar al-Assad. Depuis le mois de septembre, une vingtaine de soldats libanais ont été capturés par al-Nosra et certains décapités. D’autres sont encore menacés d’exécution si les djihadistes n’obtiennent pas le retrait du Hezbollah en Syrie.
L’armée paraît d’autant plus vulnérable que plusieurs de ses membres, sunnites, ont publiquement rallié al-Nosra et à l’État islamique, qui tente lui aussi de fragiliser le Liban.
Le Liban a fermé ses frontières aux réfugiés
Le pays subit les contrecoups de la guerre civile syrienne. En effet, près d’un million et demi de réfugiés syriens y ont trouvé asile pour une population de 4,5 millions de Libanais. Dissimulés parmi ces malheureux, des hommes de l’État islamique se sont installés dans la vallée de la Bekaa. Face au risque humanitaire et sécuritaire, le Liban a décidé de fermer ses frontières aux réfugiés le 19 octobre.
Mais ces derniers jours, le camp d’Arsal a été le théâtre d’affrontements violents entre djihadistes de l’EI et l’armée libanaise. Le 23 octobre, une opération militaire à Denniyé mettait la main sur un groupe d’hommes de l’EI qui recrutaient des Libanais. Dans la ville de Bhenine, des tirs à l’arme lourde ont retenti cette semaine et des voitures piégées ont été désamorcées.
Des divisions multiples
Tous ces accrochages ont lieu dans des espaces de contact entre les diverses communautés libanaises qui se reprochent mutuellement leur attitude à l’égard de la guerre en Syrie. Les chiites appuient le pouvoir de Bachar al-Assad tandis que les sunnites lui préfèrent l’opposition, voire les djihadistes.
Quant aux chrétiens, encore silencieux, ils penchent pour Damas en raison de la menace terroriste et du sort réservé aux chrétiens de Mossoul.
Tripoli : tout un symbole
Le Liban semble ainsi renouer avec ses vieux démons, dont Tripoli est le symbole.
Lors de la guerre de 1975-1990, la ville avait vu l’affrontement entre les sunnites d’un côté et les populations chiites et alaouites de l’autre. Une nouvelle implosion du pays serait pour le djihadisme international une aubaine pour son recrutement et une preuve que toute cohabitation est impossible au Moyen Orient.
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mam