Qu'elle soit minoritaire, en progression ou relative ne change rien au fait qu'elle soit inacceptable sur les plans moral, social, pénal et constitutionnel. Que nombre de ses manifestations restent invisibles car intériorisées par ceux et celles qui la subisse ne veut pas non plus dire que ses conséquences humaines soient une abstraction, surtout lorsqu'il s'agit de jeunes femmes et de jeunes hommes pas forcément préparé(e)s à cette forme de violence.
Je ne crois pas qu'il faille déconnecter le racisme de rue du racisme étatique car souvent le premier accouche du second en ceci que les mécanismes de discrimination structurelle favorisent un climat social et alimentent l'imaginaire collectif. Ce qui vaut pour la figure du musulman vaut pour celle de l'arabe, du noir, du manouche et l'ensemble des populations qui furent catégorisées et dominées par le pouvoir politique.
Le problème de la "gauche" se situe bien là à mon avis, tout se passe comme si ce diagnostique, qui impliquerait une nécessaire remise en question intellectuelle de ses fondamentaux, ne pouvait survenir au sein des partis dits de gouvernement. Mais même lorsqu'on regarde les boîtes à idées, journaux et autres think tanks l'idée d'une refonte de l'antiracisme sur des bases concrètes y est très peu défendue. Il n'y a, et c'est une logique quadrature du cercle, que dans la rue où ce besoin fasse écho à l'état d'urgence du vécu discriminatoire.
C'est la raison pour laquelle je pense que les discriminé-e-s n'ont d'autres perspectives que de constituer eux-mêmes en force politique. C'est cette prise de conscience qui fût à l'origine des mobilisations de 83 avec le bilan catastrophique que l'on connaît. Je pense que c'est à partir de cette expérience ratée qu'une coalition antiraciste authentique devrait chercher à construire de nouvelles convergences, encrées dans la réalité sociologique de ce pays mais aussi la fraternité internationaliste car des enjeux similaires traversent la plupart des continents.