L'origine du virus mexicain reste très mystérieuse
Jean-Michel Bader
Le virus mexicain dit «porcin» se transmet d'homme à homme, mais n'a pas à ce jour été isolé chez le porc !
Le virus de grippe porcine, qui provoque au Mexique et aux États-Unis des cas groupés d'infections respiratoires sévères en se transmettant directement d'homme à homme, reste bien mystérieux. Dans un premier temps, le Mexique a cru qu'il ne s'agissait que d'un virus humain saisonnier tardif. Il a fallu qu'une vingtaine de cas surviennent au Kansas, en Californie, au Texas et dans l'Ohio, chez des personnes jeunes n'ayant pas de contact avec des animaux, pour que des batteries de tests soient lancées sur les prélèvements de ces malades. On a établi très vite qu'il s'agissait d'un virus A H1N1, mais les réactifs habituels pour détecter les plus fréquents sous-types viraux humains ne réagissaient pas avec ce nouveau virus.
Les experts des Centers for Disease Control (CDC) d'Atlanta ont alors considéré ces patients comme des cas humains probables de grippe porcine. En effet, les virus grippaux du porc peuvent infecter les humains, même si c'est un événement rare. Des études récentes de chercheurs vétérinaires américains ont établi que 15 à 25 % des fermiers qui élèvent des porcs ont été infectés sans le savoir par des virus de cochons, ainsi que 10 % des vétérinaires. Et 30 à 50 % des élevages de porcs américains sont infectés par l'un ou l'autre des virus porcins.
Les jeunes adultes urbains sont les plus touchés
Mais ce nouveau virus échappe à cette logique. Tout d'abord, comme l'annonçait lundi l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE), «à ce jour, le virus H1N1 n'a pas été isolé chez l'animal. Il n'est donc pas justifié d'utiliser l'appellation grippe porcine». L'OIE préfère la dénomination de grippe nord-américaine. Ensuite, la quasi-totalité des cas humains sont des jeunes adultes urbains qui n'ont jamais été en contact direct avec le H1N1.
C'est d'ailleurs ce caractère transmissible d'homme à homme d'un nouveau virus qui lui donne son potentiel pandémique. Autre interrogation sans réponse : pourquoi le Mexique comptabiliserait déjà 149 morts pour 1 600 cas de cette grippe nord-américaine, alors qu'aucun des quelque 40 cas aux États-Unis n'a été mortel ? Difficultés d'accès aux soins, problèmes financiers ou particularités génétiques des populations mexicaines ? On ne le sait pas.
Par ailleurs, les analyses génétiques effectuées très rapidement sur ce nouveau virus H1N1 montrent qu'il s'agit d'un réassortiment entre deux virus. Les biologistes américains ont depuis lundi élucidé la séquence totale du virus en question. Celui-ci mélange certains éléments de deux virus H1N1 classiquement présents chez le porc, le virus H1N1 «classique» endémique aux États-Unis et la souche dite eurasienne «avian-like», qui a remplacé la souche classique chez les cochons européens.
Pour être tout à fait précis, un virus grippal comporte toujours huit segments : ce nouveau virus est une mosaïque complexe jamais vue, comportant deux gènes de la souche classique nord-américaine de porc, deux segments génétiques «Swine» eurasien, et le gène de l'hémagglutinine (HA) de la souche classique. Plus deux gènes d'origine aviaire américaine et un gène de virus de grippe humain.
Ces données génétiques vont permettre à des chercheurs, comme Vincent Enouf (Institut Pasteur, Paris), de mettre au point un test diagnostic spécifique de cette souche qui fera le tri entre la grippe usuelle et le virus pandémique.
Source LeFigaro
http://www.lefigaro.fr/sante/2009/0...du-virus-mexicain-reste-tres-mysterieuse-.php