Bonjour à tous !
Ce Post date mais j'espère que cette excellente réponse d'un universitaire, sur le forum de "Arca Librairie" pourra servir à beaucoup d'autres !! (copié collé, merci ibn al-3adam qui que tu sois ! ) : (posté en 2 parties)
PARTIE 1
"Chères sœurs et chers frères de la Quête,
Que la Paix soit sur vous !
En ce qui concerne les traductions du Coran, voici quelques considérations personnelles qui pourront peut-être aider/orienter la lecture des chercheurs qui n’ont pas beaucoup de familiarité avec la tradition islamique ou la langue arabe. Je ne passe pas en revue l’ensemble des traductions disponibles, mais seulement les plus répandues dans le public francophone et non-musulman, ainsi que celles que j’ai fréquentées personnellement. Il y a en effet une grande quantité de traductions moyennes voire passablement mauvaises que je ne prends pas la peine de citer ici. J’ai mis également les liens pour télécharger les textes disponibles, ou vers les sites des éditions des plus récents.
- Commençons par la traduction de Savary (1783), que l’on retrouve encore dans certaines bibliothèques. Elle incarne à merveille l’adage « traduire c’est trahir », tant le langage choisi par Savary est truffé d’expressions bibliques typiques de la mentalité et du langage de son époque, qui sont souvent très (très) loin du sens du texte arabe d’origine. Comble de l’infidélité au texte : Savary n’hésite pas à triturer les versets, à les amputer ou mieux, à les compléter par des phrases de son cru, souvent pour appuyer le sens biaisé de sa traduction. En bref : « ceci n’est pas le Coran » !
www.lenoblecoran.fr/claude-etienne-savary/
- La traduction de Kazimirski (1840) est encore très répandue, car le travail philologique de son auteur (son fameux dictionnaire Arabe/Français qui est une mine d’or pour le vocabulaire bédouin et chamelier) lui confère un statut de connaisseur. Néanmoins, force est de constater que Kazimirski se base sur le travail de Savary, et que s’il le corrige et l’améliore, il n’en reste pas moins tributaire d’une lecture très marquée par le vocabulaire chrétien français de l’époque. Malgré une connaissance certaine de l’étendue de la polysémie arabe, Kazimirski ne semble pas connaître la révélation et la tradition « de l’intérieur » et adopte un regard très « orientaliste ». En bref : à lire avec des pincettes, plutôt comme un témoignage de a façon dont les orientalistes français lisaient le Coran que comme une traduction fiable.
www.lenoblecoran.fr/albert-kazimirski/
- Les traductions de Blachère (1947), Masson (1967) et Berque (1991) font toutes l’effort de coller le plus possible à la langue arabe. Elles sont plus fournies au niveau de l’apparat critique et/ou interprétatif, et elles s’influencent d’ailleurs l’une l’autre à plusieurs niveaux. Elles adoptent chacune une approche spécifique : critique textuelle pour Blachère qui choisit de rendre le texte dans un ordre chronologique supposé plutôt que dans l’ordre de la vulgate, approche plus littéraire et comparatiste pour Masson et Berque, ce dernier prenant parfois en compte certaines exégèses classiques. A mon goût, celle de Masson est la plus équilibrée, bien qu’elle n’est pas exempte de choix étonnants et que sa démarche comparatiste la leste parfois d’un vocabulaire encore trop « bilbique » par rapport aux sens de la langue arabe. Signalons également une spécificité qui intéressera certainement les chercheurs de ce site : Masson a truffé sa traduction de renvois aux passages bibliques qui font échos aux versets, ce qui en fait un formidable outil pour la Quête ! En bref : de bons outils pour approcher le Coran par le français, mais en gardant à l’esprit qu’ils restent marqués par un point de vue extérieur à la tradition.
www.lenoblecoran.fr/regis-blachere/
www.lenoblecoran.fr/denise-masson/
www.lenoblecoran.fr/jacques-berque/
Ce Post date mais j'espère que cette excellente réponse d'un universitaire, sur le forum de "Arca Librairie" pourra servir à beaucoup d'autres !! (copié collé, merci ibn al-3adam qui que tu sois ! ) : (posté en 2 parties)
PARTIE 1
"Chères sœurs et chers frères de la Quête,
Que la Paix soit sur vous !
En ce qui concerne les traductions du Coran, voici quelques considérations personnelles qui pourront peut-être aider/orienter la lecture des chercheurs qui n’ont pas beaucoup de familiarité avec la tradition islamique ou la langue arabe. Je ne passe pas en revue l’ensemble des traductions disponibles, mais seulement les plus répandues dans le public francophone et non-musulman, ainsi que celles que j’ai fréquentées personnellement. Il y a en effet une grande quantité de traductions moyennes voire passablement mauvaises que je ne prends pas la peine de citer ici. J’ai mis également les liens pour télécharger les textes disponibles, ou vers les sites des éditions des plus récents.
- Commençons par la traduction de Savary (1783), que l’on retrouve encore dans certaines bibliothèques. Elle incarne à merveille l’adage « traduire c’est trahir », tant le langage choisi par Savary est truffé d’expressions bibliques typiques de la mentalité et du langage de son époque, qui sont souvent très (très) loin du sens du texte arabe d’origine. Comble de l’infidélité au texte : Savary n’hésite pas à triturer les versets, à les amputer ou mieux, à les compléter par des phrases de son cru, souvent pour appuyer le sens biaisé de sa traduction. En bref : « ceci n’est pas le Coran » !
www.lenoblecoran.fr/claude-etienne-savary/
- La traduction de Kazimirski (1840) est encore très répandue, car le travail philologique de son auteur (son fameux dictionnaire Arabe/Français qui est une mine d’or pour le vocabulaire bédouin et chamelier) lui confère un statut de connaisseur. Néanmoins, force est de constater que Kazimirski se base sur le travail de Savary, et que s’il le corrige et l’améliore, il n’en reste pas moins tributaire d’une lecture très marquée par le vocabulaire chrétien français de l’époque. Malgré une connaissance certaine de l’étendue de la polysémie arabe, Kazimirski ne semble pas connaître la révélation et la tradition « de l’intérieur » et adopte un regard très « orientaliste ». En bref : à lire avec des pincettes, plutôt comme un témoignage de a façon dont les orientalistes français lisaient le Coran que comme une traduction fiable.
www.lenoblecoran.fr/albert-kazimirski/
- Les traductions de Blachère (1947), Masson (1967) et Berque (1991) font toutes l’effort de coller le plus possible à la langue arabe. Elles sont plus fournies au niveau de l’apparat critique et/ou interprétatif, et elles s’influencent d’ailleurs l’une l’autre à plusieurs niveaux. Elles adoptent chacune une approche spécifique : critique textuelle pour Blachère qui choisit de rendre le texte dans un ordre chronologique supposé plutôt que dans l’ordre de la vulgate, approche plus littéraire et comparatiste pour Masson et Berque, ce dernier prenant parfois en compte certaines exégèses classiques. A mon goût, celle de Masson est la plus équilibrée, bien qu’elle n’est pas exempte de choix étonnants et que sa démarche comparatiste la leste parfois d’un vocabulaire encore trop « bilbique » par rapport aux sens de la langue arabe. Signalons également une spécificité qui intéressera certainement les chercheurs de ce site : Masson a truffé sa traduction de renvois aux passages bibliques qui font échos aux versets, ce qui en fait un formidable outil pour la Quête ! En bref : de bons outils pour approcher le Coran par le français, mais en gardant à l’esprit qu’ils restent marqués par un point de vue extérieur à la tradition.
www.lenoblecoran.fr/regis-blachere/
www.lenoblecoran.fr/denise-masson/
www.lenoblecoran.fr/jacques-berque/