Musulman, oui, mais musulman modéré

La question ne se pose effectivement pas en ces termes en Islam.

Développer une culture critique en exerçant une critique non "spécialiste" du dogme c'est déjà peut-être sortir de l'impasse...

J'ai pas plus de réponse que toi khouya :/


Je pense que la pluralité discursive existe déjà, elle se manifeste entre autres par l'émergence de plus en plus prononcée d'intellectuels dans le monde musulman qui choisissent d'être les sujets, et non plus les objets seulement, de l'exercice de la pensée religieuse.

A l'imposition d'un discours dominant et d'une dialectique dogmatique aiguillée autour d'une dynamique d'émission-absorption, et non de questionnement ni de débat critique, ils font naître une résonance qui met à mal l'uniformité d'apparence de la pensée musulmane dont les "garants" auto-proclamés voudraient maintenir l'illusion.

Cependant, je reviens sur ce qui consiste à mon sens le risque majeur que cette pensée émergente subit, celle de la censure forcée et de la dissimulation. Il ne suffit pas que ces auteurs soient édités dans le monde occidental auprès d'un public non-unanimement acquis, sociologiquement ou identitairement, à la légitimité d'un questionnement théologique. Il faut aussi qu'ils le soient au sein des pays musulmans, là où se joue l'avenir et le destin de l'évolution du dogme islamique, bien davantage qu'en Europe où la religion occupe encore trop un rôle fédérateur et identitaire préventif d'une complète disponibilité à des bouleversements d'ordre interprétatif.

Or on sait, malheureusement, que l'accès au libre discours de ces penseurs n'est pas garantie, il est même menacée. J'en ai cité des exemples plus haut. Même des penseurs tel T. Ramadan (dont on peut certes débattre si la définition de renouveau exégétique s'applique réellement à sa pensée, mais autre débat), font l'objet de censures et d'interdits dans des pays musulmans où toute expression d'une autre forme de pensée exégétique que celle auto-sacralisée d'Al-Azhar et consorts, est automatiquement taxée d'hérésie.

L'enjeu de l'effort, dans un premier, sera celui de l'accès au droit de parole. Or celui-ci demeure encore largement tributaire des structures de pouvoir et des assises financières permettant une diffusion orientée et à sens unique.
 
Je pense que la pluralité discursive existe déjà, elle se manifeste entre autres par l'émergence de plus en plus prononcée d'intellectuels dans le monde musulman qui choisissent d'être les sujets, et non plus les objets seulement, de l'exercice de la pensée religieuse.

A l'imposition d'un discours dominant et d'une dialectique dogmatique aiguillée autour d'une dynamique d'émission-absorption, et non de questionnement ni de débat critique, ils font naître une résonance qui met à mal l'uniformité d'apparence de la pensée musulmane dont les "garants" auto-proclamés voudraient maintenir l'illusion.

Cependant, je reviens sur ce qui consiste à mon sens le risque majeur que cette pensée émergente subit, celle de la censure forcée et de la dissimulation. Il ne suffit pas que ces auteurs soient édités dans le monde occidental auprès d'un public non-unanimement acquis, sociologiquement ou identitairement, à la légitimité d'un questionnement théologique. Il faut aussi qu'ils le soient au sein des pays musulmans, là où se joue l'avenir et le destin de l'évolution du dogme islamique, bien davantage qu'en Europe où la religion occupe encore trop un rôle fédérateur et identitaire préventif d'une complète disponibilité à des bouleversements d'ordre interprétatif.

Or on sait, malheureusement, que l'accès au libre discours de ces penseurs n'est pas garantie, il est même menacée. J'en ai cité des exemples plus haut. Même des penseurs tel T. Ramadan (dont on peut certes débattre si la définition de renouveau exégétique s'applique réellement à sa pensée, mais autre débat), font l'objet de censures et d'interdits dans des pays musulmans où toute expression d'une autre forme de pensée exégétique que celle auto-sacralisée d'Al-Azhar et consorts, est automatiquement taxée d'hérésie.

L'enjeu de l'effort, dans un premier, sera celui de l'accès au droit de parole. Or celui-ci demeure encore largement tributaire des structures de pouvoir et des assises financières permettant une diffusion orientée et à sens unique.

Je suis d'accord avec ça mais je pense que si le sujet musulman reprend des mains du "savant" la technicité interprétative en en redéfinissant les canons, le pouvoir islamique autoproclamé se trouvera sapé dans ses fondements. Ce sur quoi s'appuient les dites autorités c'est essentiellement le privilège de rendre justice au nom du dogme: "leurs" jurisprudences s'imposent au plus grand nombre. Sur le plan intellectuel ce sont ces textes qu'il faut attaquer de front, détruire leur légitimité en martelant des alternatives épistémologiques, historiques et linguistiques.

Il n'y a aucun moyen de "lutter" contre la censure si ce n'est exercer sa liberté d'expression partout et toujours avec sérieux et sens de la responsabilité. L'entreprise est délétère, dans certains pays plus que d'autres, mais c'est un prix à payer qui fait partie intégrante du travail des intellectuel-l-e-s. Ce que je voulais dire c'est que l'intervention de ceux-ci dans la sphère publique n'ouvre aucune perspective sans l'intérêt et le concours des non spécialistes. Le musulman lambda doit se sentir concerné, devenir acteur de sa foi, éveiller sa propre conscience religieuse en accroissant son niveau de connaissances, en ouvrant son esprit à la science. C'est là un appel coranique fondamental, et un message à portée universelle...
 
Je suis d'accord avec ça mais je pense que si le sujet musulman reprend des mains du "savant" la technicité interprétative en en redéfinissant les canons, le pouvoir islamique autoproclamé se trouvera sapé dans ses fondements. Ce sur quoi s'appuient les dites autorités c'est essentiellement le privilège de rendre justice au nom du dogme: "leurs" jurisprudences s'imposent au plus grand nombre. Sur le plan intellectuel ce sont ces textes qu'il faut attaquer de front, détruire leur légitimité en martelant des alternatives épistémologiques, historiques et linguistiques.

Il n'y a aucun moyen de "lutter" contre la censure si ce n'est exercer sa liberté d'expression partout et toujours avec sérieux et sens de la responsabilité. L'entreprise est délétère, dans certains pays plus que d'autres, mais c'est un prix à payer qui fait partie intégrante du travail des intellectuel-l-e-s. Ce que je voulais dire c'est que l'intervention de ceux-ci dans la sphère publique n'ouvre aucune perspective sans l'intérêt et le concours des non spécialistes. Le musulman lambda doit se sentir concerné, devenir acteur de sa foi, éveiller sa propre conscience religieuse en accroissant son niveau de connaissances, en ouvrant son esprit à la science. C'est là un appel coranique fondamental, et un message à portée universelle...

Oui, mais "reprendre des mains du savant la technicité interprétative", comme tu dis, requiert à la fois des compétences et l'accès à un savoir religieux qui a plutôt l'habitude, hélas, dans le monde musulman, de se donner "d'en haut" et de se recevoir "d'en bas". La mentalité musulmane fonctionnant fortement par référence aux avis, aux classifications faites part d'autres, à l'argument de l'autorité, la culture actuelle est peu axée vers une acceptation de la légitimité d'une pensée individuelle détachée d'une référence à un savoir "officiel".

C'est à travailler, assurément, mais ne pourra se faire sans l'évolution parallèle des structures sociales, politiques, éducatives et démocratiques des pays musulmans. Je pense qu'il est vain d'espérer la démocratisation de la pensée musulmane, au sens de sa pluralité reconnue comme légitime, sans une culture politique adjacente elle aussi orientée vers l'ouverture et le droit à l'expression plurielle.
 
Je suis d'accord avec ça mais je pense que si le sujet musulman reprend des mains du "savant" la technicité interprétative en en redéfinissant les canons, le pouvoir islamique autoproclamé se trouvera sapé dans ses fondements. Ce sur quoi s'appuient les dites autorités c'est essentiellement le privilège de rendre justice au nom du dogme: "leurs" jurisprudences s'imposent au plus grand nombre. Sur le plan intellectuel ce sont ces textes qu'il faut attaquer de front, détruire leur légitimité en martelant des alternatives épistémologiques, historiques et linguistiques.

Il n'y a aucun moyen de "lutter" contre la censure si ce n'est exercer sa liberté d'expression partout et toujours avec sérieux et sens de la responsabilité. L'entreprise est délétère, dans certains pays plus que d'autres, mais c'est un prix à payer qui fait partie intégrante du travail des intellectuel-l-e-s. Ce que je voulais dire c'est que l'intervention de ceux-ci dans la sphère publique n'ouvre aucune perspective sans l'intérêt et le concours des non spécialistes. Le musulman lambda doit se sentir concerné, devenir acteur de sa foi, éveiller sa propre conscience religieuse en accroissant son niveau de connaissances, en ouvrant son esprit à la science. C'est là un appel coranique fondamental, et un message à portée universelle...
C'est exactement l'état des lieux que je fais, la prise de conscience est forcément individuelle, il y a peu de relais de la parole musulmane si l'on a pas vocation à intégrer une université de sciences islamiques ou de théologie, ou à épouser l'imamat.
Et ne me parlez pas du CFCM!;)
Je parle bien sûr de l'aspect purement dogmatique de notre religion, pas de son instrumentalisation politique.
 
Oui, mais "reprendre des mains du savant la technicité interprétative", comme tu dis, requiert à la fois des compétences et l'accès à un savoir religieux qui a plutôt l'habitude, hélas, dans le monde musulman, de se donner "d'en haut" et de se recevoir "d'en bas". La mentalité musulmane fonctionnant fortement par référence aux avis, aux classifications faites part d'autres, à l'argument de l'autorité, la culture actuelle est peu axée vers une acceptation de la légitimité d'une pensée individuelle détachée d'une référence à un savoir "officiel".

C'est à travailler, assurément, mais ne pourra se faire sans l'évolution parallèle des structures sociales, politiques, éducatives et démocratiques des pays musulmans. Je pense qu'il est vain d'espérer la démocratisation de la pensée musulmane, au sens de sa pluralité reconnue comme légitime, sans une culture politique adjacente elle aussi orientée vers l'ouverture et le droit à l'expression plurielle.

C'est sans doute vrai, mais la paradigme est le même: Pas de culture politique sans irruption des classes populaires dans la sphère publique. De l'appropriation de leur destin dépendent les transformations historiques des sociétés. Ici aussi l'ecueil réside dans la déléguation des affaires à une technocratie (par définition non représentative), voter ne suffit pas... Nous avons à définir nos propres standards, nos propres modèles de société, et sans débat public profond (nécessairement long et laborieux) le renversement des administrations auxquelles on assiste depuis plusieurs mois n'aura aucune vertu structurelle...
 
C'est sans doute vrai, mais la paradigme est le même: Pas de culture politique sans irruption des classes populaires dans la sphère publique. De l'appropriation de leur destin dépendent les transformations historiques des sociétés. Ici aussi l'ecueil réside dans la déléguation des affaires à une technocratie (par définition non représentative), voter ne suffit pas... Nous avons à définir nos propres standards, nos propres modèles de société, et sans débat public profond (nécessairement long et laborieux) le renversement des administrations auxquelles on assiste depuis plusieurs mois n'aura aucune vertu structurelle...

Oui, cela rejoint en substance la nécessite de démocratisation "globale" dont je parlais, pas seulement celle de la sphère politique mais celle aussi de la pensée religieuse et critique, les deux s'inter-pénétrant. La pluralité de discours, rendue possible par une levée de censure, sera une des conditions à cette participation citoyenne que tu décris, au passage du rôle d'"objet" à celui de "sujet" du devenir des sociétés musulmanes.

Toutes les évolutions actuelles suite au Printemps arabe ne permettent cependant pas de verser encore dans un optimisme démesuré.
 
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