Reporters sans frontières condamne vivement la décision du ministère de lIntérieur marocain de saisir le dernier numéro de lhebdomadaire indépendant TelQuel (et sa version arabe, Nichane), le samedi 1er août 2009, suite à la publication dun sondage sur le bilan des dix premières années du règne du roi Mohammed VI.
« Cette décision, à la fois archaïque et illégale, constitue une nouvelle violation de la liberté de la presse au Maroc. Les fameuses lignes rouges qui entravent la liberté dexpression doivent disparaître. Les Marocains, quils soient journalistes ou non, devraient pouvoir exprimer leur opinion sur le Roi et la monarchie, sans crainte dêtre arrêtés, emprisonnés, ou condamnés à payer de lourdes amendes », a déclaré lorganisation.
Le 1er août, deux jours après la fête du trône, le ministère de lIntérieur marocain a exigé la saisie des 100 000 exemplaires de TelQuel et Nichane, lesquels ont tous été détruits le lendemain. Les deux hebdomadaires venaient de publier un sondage, effectué en partenariat avec le quotidien français Le Monde, révélant que 91% des Marocains interrogés jugeaient le bilan de Mohammed VI positif ou très positif.
Le ministre de la Communication, Khalid Naciri, a déclaré à lAgence France-Presse que « la monarchie au Maroc nest pas une équation et ne peut faire lobjet dun débat, même par voie de sondage », ajoutant que, si Le Monde venait à publier ce sondage, « il ne pourra être mis en vente au Maroc ».
« Le ministère de lIntérieur ment, dans la mesure où aucun article du Code pénal marocain ou du code de la presse ninterdit la publication dun tel sondage. Cette décision de saisie est donc illégale. Par ailleurs, la destruction des exemplaires, avant même que le journal puisse faire appel, constitue une seconde infraction à larticle 77 du Code de la presse. Et enfin, la police ayant aujourdhui refusé de me notifier la décision du ministère, je ne peux même pas porter plainte ! En mettant en avant une soi-disante atteinte à la sacralité du roi, les autorités sont en flagrant délit de mensonge », sest indigné le directeur de publication de TelQuel, Ahmed Benchemsi, interrogé par Reporters sans frontières le 3 août.
Le Monde, daté du mardi 4 août, publiant le sondage incriminé, devrait être interdit de distribution au Maroc. Contacté par Reporters sans frontières, le directeur de publication du quotidien français, Eric Fottorino, a déclaré « protester contre cette mesure incompréhensible et absurde ». « En agissant de la sorte, le régime marocain bafoue lopinion de son peuple, ce qui est grave pour un régime qui dit souvrir. Le sondage en question est sérieux, réalisé auprès de 1100 personnes. Aussi le journal a-t-il décidé de maintenir son envoi dexemplaires vers le Maroc, certes avec une voilure restreinte afin de limiter les pertes, mais pour que les autorités marocaines prennent la responsabilité de saisir elles-mêmes le journal, et que ce ne soit pas Le Monde qui vienne à sauto-censurer. Cette décision porte atteinte à limage du Maroc », a-t-il ajouté
RSF