Plainte
"Je meurs, sans que pourtant meure en moi
Lardeur de mon amour pour Toi,
Et Ton amour, mon unique but,
Na pas apaisé la fièvre de mon âme.
Vers Toi seul mon esprit jette son cri ;
En Toi repose toute mon ambition,
Et pourtant Ta richesse est bien au-dessus
De la pauvreté de mon humble amour.
Je tourne vers Toi ma prière
Et je cherche ne Toi mon ultime repos
Vers Toi monte ma sourde plainte,
Tu hantes ma secrète pensée.
Si longtemps que dure ma maladie,
Cette fastidieuse infirmité,
Jamais je ne dirai aux hommes
Le fardeau que Tu mas fait porter.
A Toi seul est manifeste
La lourde peine de mon cur,
Aucun autre, proche ni voisin, ne sut jamais
La mesure débordante de ma peine.
Une fièvre brûle dans mon cur
Et me ravage tout entier ;
Elle a détruit ma force et mon appui
Et consumé lentement mon âme.
Ne guides-Tu pas dans le chemin
Le cavalier fatigué de son faix ?
Ne délivres-Tu pas des pas de la mort
Le voyageur vagabond ?
Nas-tu pas allumé un phare aussi
Pour ceux qui trouvèrent la bonne direction
Mais ne portaient pas dans leurs mains
La plus petite lueur de son flambeau ?
Oh ! Donne-moi donc Ta faveur
Pour que je vive, ainsi assisté,
Et par Toi surmonte sans peine
Les rigueurs de ma pauvreté."
(Dhûl-Nûn al-Misri) dans « Anthologie du Soufisme », p. 161