Vu que le sujet vous fascine, on continue notre tour historique des sciences et des religions.
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Même si ce réalisme semble a priori attirant, nous verrons plus loin que notre connaissance de la physique moderne le rend difficile ment défendable. Les principes de la physique quantique, qui est une description assez fidèle de la nature, nous enseignent ainsi qu’une particule ne possède ni position ni vitesse définie tant que celle-ci
n’est pas mesurée par un observateur. Il est par conséquent inexact de dire qu’une mesure donne un certain résultat car la quantité mesurée n’acquiert sa valeur qu’à l’instant même de la mesure. En fait, certains objets ne possèdent même pas d’existence indépendante, mais ne sont que des composants d’un tout beaucoup plus grand. Et si la théorie baptisée principe holographique se révèle correcte, nous et notre monde quadridimensionnel ne sommes peut-être que des ombres sur la frontière d’un espace-temps à cinq dimensions. Notre statut dans l’Univers serait alors analogue à celui du poisson rouge.
Pour les stricts défenseurs du réalisme, le succès même des théories scientifiques est une preuve de leur aptitude à représenter la réa lité. Pourtant, plusieurs théories peuvent rendre compte avec succès d’un même phénomène tout en faisant appel à des cadres conceptuels distincts. Mieux encore, il est souvent arrivé qu’une théorie scientifique reconnue soit remplacée par une autre tout aussi fructueuse bien que fondée sur des conceptions de la réalité totalement nouvelles.
On appelle traditionnellement les opposants au réalisme des anti réalistes. Ces derniers postulent une distinction entre connaissance empirique et connaissance théorique. Les observations et les expériences sont considérées par eux comme utiles, mais les théories ne sont rien d’autre que des instruments n’apportant aucune vérité plus
profonde sur les phénomènes étudiés. Certains ont même suggéré de ne cantonner la science qu’aux observations. Ainsi nombreux sont ceux qui, au XIX e siècle, ont rejeté l’idée d’atome au motif qu’on ne pourrait jamais en voir. George Berkeley (1685-1753) est même allé jusqu’à prétendre que rien n’existe hormis l’esprit et les idées. On ra conte qu’un de ses amis lui ayant affirmé qu’on ne pouvait réfuter les idées de Berkeley, le docteur Samuel Johnson, écrivain et lexicographe anglais (1709-1784), se dirigea vers une grosse pierre et shoota dedans, avant de déclarer : « Je réfute donc cela. » La douleur qu’il ressentit alors au pied n’étant elle aussi qu’une idée dans son cerveau, on ne peut pas vraiment voir là une réfutation des idées de Berkeley. Cependant, cette réponse est une bonne illustration de la position du philosophe David Hume (1711-1776). Selon lui, bien que rien ne nous force à croire en une réalité objective, nous devons en fait agir comme si elle existait.